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Quand on pense à la somme de savoir, de travail, de persévérance dépensée pour obtenir la réalisation du problème, il y a si peu de temps encore réputé chimérique, il y a lieu de redresser quelque peu la tête et d’être fier de cette invention exclusivement française, et perfectionnée par les seuls Français. Cela est du bon chauvinisme. Saurons-nous seulement tirer parti des résultats acquis ; ne laisserons-nous pas les étrangers, « moins malins », mais plus habiles, exploiter le domaine défriché par les Montgolfier, les Renard et les Tissandier ? Espérons qu’il n’en sera rien. En attendant, sans préjuger l’avenir, poursuivons notre étude sommaire de l’aérostat Tissandier.

Le point de départ, en quelque sorte l’embryon du ballon qui a si bien manœuvré hier au-dessus du Jardin des Plantes, a été le petit aérostat électrique que l’on se souvient d’avoir vu fonctionner à l’exposition d’électricité en 1881. Le succès de cette expérience minuscule (le moteur ne pesait que 220 grammes) encouragea M. Gaston Tissandier à l’entreprendre à grand air libre.

Ceci dit en passant, sans diminuer en rien le mérite des savants capitaines du parc de Chalais, il est équitable de faire remarquer que leur première expérience a été postérieure à celle de MM. Tissandier. Nous pourrons tout à l’heure tirer de là une conclusion.

Une remarque puérile si l’on veut, mais assez curieuse. Les aéronautes les plus distingués par leurs facultés inventives — nous ne disons pas par leur audace, pour laisser à Nadar ce qui appartient à Nadar — vont par deux frères. Les frères Montgolfier, les frères Tissandier, les frères Renard.

Fig. 519. — M. Gaston Tissandier.

Dans la collaboration Tissandier, c’est M. Gaston qui est l’électricien, M. Albert l’architecte.

M. Gaston Tissandier s’est attaché à la construction des piles, du moteur dynamo-électrique et d’un appareil à gaz hydrogène. M. Albert Tissandier a exécuté l’aérostat proprement dit, avec sa housse de suspension et sa nacelle.

Donnons maintenant, d’après une intéressante brochure publiée par M, Tissandier, quelques détails sur les dimensions, la construction et le poids de l’aérostat.

Il mesure 28 mètres de longueur de pointe en pointe et 9 mètres 20 de diamètre au milieu. À la partie inférieure se trouve un cône d’appendice, terminé par une soupape automatique. Le tissu employé est la percaline, vernie par un procédé spécial. Le volume du ballon est de 1 060 mètres cubes.

La housse de suspension, faite de rubans cousus à des fuseaux longitudinaux, est construite de sorte qu’elle s’adapte mathématiquement au ballon et en épouse complètement la forme. Toute déformation du système est ainsi rendue impossible.

Quel est maintenant le poids des différentes parties du matériel ?


Aérostat 
170 kil.
Housse avec gouvernail 
70
Brancards latéraux 
34
Nacelle 
100
Moteur, hélice et piles 
280
Engins d’arrêt 
50
Voyageurs avec instruments 
150
Lest 
396
Total 
1 250 kil.

Il est intéressant de comparer les dimensions et les poids que nous venons d’énumérer avec ceux du ballon Renard.

On remarquera tout d’abord que le ballon Tissandier est moins allongé que celui de Meudon. Le ballon Renard présente en effet une longueur de 50m,42 et un diamètre de 8m,40. Il est donc plus long presque du double, mais un peu plus mince.

En revanche, il est notablement moins léger, malgré le poids de lest beaucoup plus considérable emporté par MM. Tissandier (386 kilogrammes contre 214).

La nacelle du capitaine Renard pèse 452 kilogrammes au lieu de 100, le filet et la chemise pèsent 127 kilogrammes au lieu de 70 kilogrammes y compris le gouvernail, tandis que le gouvernail Renard pèse à lui seul 446 kilogrammes.

Nous ne tirons de cette comparaison aucune