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qui fut le point de départ de leur fortune.

En 1849, les habitants de Venise assiégée par les Autrichiens donnaient de leurs nouvelles aux amis du dehors, grâce aux pigeons voyageurs.

Le rôle admirable que les pigeons voyageurs ont joué pendant le blocus de Paris par les armées prussiennes, en 1870-1871, restera acquis à l’histoire. On n’oubliera jamais que l’espérance et le salut d’un million d’hommes étaient suspendus à l’aile d’un oiseau.


L’idée de faire usage de pigeons voyageurs qui, emportés par les ballons-poste, seraient lâchés hors de Paris, avec des dépêches attachées sous leurs ailes, vint dès le jour de l’expédition des ballons, aux premiers temps du siège ; mais il fallut un certain temps pour organiser ce moyen de communication.

Il existait à Paris, avant la guerre, une Société dite colombophile, qui s’occupait de dresser les pigeons, pour les faire servir de messagers aériens.

Quand on se fut bien convaincu que les ballons partis de Paris, n’y reviendraient pas, les membres de la Société colombophile eurent l’idée de confier leurs pigeons aux ballons qui partaient de Paris, par intervalles. « Que les aérostats enlèvent nos pigeons, dirent-ils, nos pigeons se chargeront bien de revenir à Paris. »

M. Rampont, directeur des postes, à qui ce projet fut communiqué, adopta sur l’heure l’idée de faire une expérience de ce moyen précieux.

Nous avons déjà dit que, le 27 septembre 1870, trois pigeons partaient dans le ballon la Ville de Florence, et que six heures après ils étaient revenus à Paris, avec une dépêche signée de l’aéronaute, qui annonçait sa descente près de Mantes.

Par cette expérience convaincante, avons-nous dit, la poste aux pigeons était créée.

En effet, après quelques études préalables sur la manière de transporter, de soigner et de lancer les pigeons, les expériences ayant réussi au delà de toute attente, M. Rampont se décida à ouvrir au public la poste aux pigeons. Les dépêches destinées à Paris s’expédiaient à Tours, d’où elles partaient pour Paris, par les pigeons que les ballons avaient emportés hors de la ville assiégée. On payait la dépêche cinquante centimes par mot.

Nous représentons sur les figures 506 et 507 le colombier de M. Van Roosebeke, l’un des membres le plus actif et le plus intelligent de la société colombophile l’Espérance, et celui de M. Derouard. Ces colombiers étaient perchés sur le toit d’une ancienne maison de la rue Saint-Martin, Ils dominaient une petite rue étroite et cachée comme celles que l’on rencontre encore aujourd’hui dans les quartiers du vieux Paris. Les colombiers de M. Van Roosebeke fournirent les premiers pigeons à la poste aérienne créée par M. Rampont.

Trois cent soixante-trois pigeons furent emportés de Paris en ballon, et lancés des départements voisins. Cinquante-sept seulement y revinrent : quatre en septembre, dix-huit en octobre, dix-sept en novembre, douze en décembre, trois en janvier et trois en février.

La poste aux pigeons complétait le service des ballons montés.


Mais ce qui rendit éminemment utile cette charmante invention, ce qui en fit une véritable création scientifique, c’est le système des dépêches photographiques que les pigeons rapportaient à Paris.

Un pigeon ne peut être chargé que d’un bien faible poids, d’un tuyau de plume, contenant un papier pesant quelques grammes, que l’on a attaché à sa queue ; mais un tel message est bien court.

Dès le commencement du siège, on son-