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Nous rappellerons encore, parmi les innombrables applications dont le téléphone est susceptible, celle qu’a faite M. Hughes, dans la construction de sa balance d’induction électrique.


L’instruction judiciaire a trouvé dans le téléphone un moyen de pénétrer les secrets d’un accusé. En 1884, un juge de New-York eut, dit-on, l’idée de faire placer un transmetteur microphonique contre le mur d’une cellule de prison, en recouvrant l’ouverture avec du papier mince, percé de petits trous, à peine visibles. Dans cette cellule on fit entrer les complices ou les parents d’un prévenu ; puis on les laissa ensemble, sans surveillant. Pendant qu’ils s’entretenaient, un agent, ou un gardien de la prison, tenait son oreille collée au transmetteur. Ce moyen réussit parfaitement. Le prévenu, ne soupçonnant rien, causa librement, avec ses complices, du crime dont il était accusé ; et la justice obtint ainsi des révélations qui n’auraient pu être arrachées au prisonnier par aucun autre moyen.

À Montevidéo, en 1883, une conspiration militaire, ayant pour but de renverser le Président de la république de l’Uruguay, fut découverte par le téléphone. Deux officiers causaient entre eux, par l’intermédiaire du bureau central de la ville. Un commandant entend, par hasard, la conversation ; aussitôt il s’empare du téléphone, en faisant tenir en respect l’officier dont il venait de surprendre les paroles dites à trop haute voix, puis il continue à converser, à sa place, avec l’interlocuteur qui parlait de la conspiration. Le commandant apprit ainsi quel était le signal convenu et le moment de la révolte, et il fit arrêter les officiers et soldats mêlés au complot.

Le téléphone sert à des usages plus pacifiques. Dans plusieurs villes d’Angleterre, il est le moyen de communication entre des joueurs d’échecs, qui, de leurs maisons, ou de cercles éloignés l’un de l’autre, font des parties, sans se déranger.

Au mois de mars 1882, les cercles d’échecs des villes de Brigthon et de Clichestre, à 25 milles de distance, organisèrent un grand tournoi de pions et de fous, qui charma les amateurs, pendant toute une journée.

Au mois de mars 1884, une grande partie d’échecs eut lieu par le téléphone entre Cardiff et Swansea, en Angleterre, et, en octobre de la même année, une partie d’échecs fut jouée par téléphone, entre huit membres du cercle des échecs à Bradford et un nombre égal de membres du cercle de Wakefield, à la distance de 25 milles.

En mai 1883, à Scarborough, dans le comté d’York, entre les rues Newborough et South, des amateurs purent jouer aux échecs au moyen du téléphone Gower Bell.

En octobre de la même année, des habitants de Wolverhampton et de Birmingham jouèrent aux échecs d’une ville à l’autre, au moyen du téléphone. Les joueurs étaient installés dans les bureaux de la National Telephone Company, tandis que ceux de Birmingtham s’étaient établis à Curzon-Hall. Circonstance particulière, le jeu eut lieu avec des pièces vivantes, c’est-à-dire avec des hommes et femmes qui se mouvaient, dans leurs costumes bariolés, sur un vaste échiquier.


Nous pourrions prolonger longtemps la liste des curieuses récréations scientifiques et autres, auxquelles a donné lieu l’invention de Graham Bell ; mais il faut savoir s’arrêter, même quand on raconte les merveilles réunies de la science et de l’art.


fin du supplément au télégraphe électrique.