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réfracter la lumière, et de recueillir ainsi, à distance, tout ou partie d’un faisceau lumineux, qui aurait servi de signaux ; grâce à un vocabulaire de convention.

C’est à M. Maurant, professeur au lycée Saint-Louis, et au colonel Laussedat, aujourd’hui directeur du Conservatoire des arts et métiers de Paris, que revient l’honneur d’avoir obtenu des résultats pratiques, en ce qui concerne la télégraphie par signaux lumineux. Ces deux physiciens se proposèrent d’émettre à grande distance, ainsi que l’avait fait Leseurre, un faisceau lumineux homogène ; et en obtenant sur ce faisceau, au moyen d’un écran opaque, des interruptions, de durée inégale, de reproduire les longues et les brèves, les traits et les points de l’alphabet Morse, si simple et si complet ; ce qui aurait permis de correspondre, en toute sûreté, à de grandes distances.

L’appareil de M. Cornu fut utilisé dans les environs de Laval. Entre Poitiers et Champagny-Saint-Hilaire, des signaux lumineux colorés franchirent, avec une vitesse remarquable, l’intervalle de ces deux villes, qui est de 40 kilomètres. Ces expériences furent faites en présence du général Vuillemot, délégué par le général Chanzy.

En novembre 1870, le Comité d’initiative pour la défense nationale de Marseille proposa au gouvernement de Tours un système de signaux lumineux, basé, comme celui qu’exécutaient à Paris MM. Maurant et Laussedat, sur l’émission de rayons lumineux brefs et longs, correspondants aux signaux du vocabulaire Morse.

Ce projet était présenté par un inspecteur des télégraphes, M. Ternant, qui avait vu fonctionner avec succès un système analogue dans le golfe Persique. M. Ternant avait fait des essais entre la mairie de Marseille et l’ancien poste sémaphorique, situé en haut de la tranchée, et les expériences avaient parfaitement réussi. Il proposait de communiquer avec Paris, par-dessus la première ligne d’investissement des armées prussiennes, qui, alors, ne dépassait pas un rayon de 40 kilomètres. La connaissance que l’on avait des hauteurs des environs de Paris, dans ce rayon, indiquait avec précision tous les points que l’on pouvait choisir pour envoyer, sans obstacle, des rayons lumineux sur les points culminants de la capitale, qui les aurait perçus sans difficulté.

Malheureusement, un des membres du Comité de la défense nationale, venu de Paris, se montra défavorable au projet.

Dans l’intervalle, MM. Lissajous et Hiroux partaient de Paris, en ballon, avec un projet du même genre.

Sur les indications de M. Lissajous, M. Santi, opticien de Marseille, construisit un télégraphe optique basé sur l’émission de rayons brefs ou longs, et permettant l’emploi de l’alphabet Morse. Mais la ligne d’investissement de Paris, qui s’était considérablement étendue, empêcha de s’occuper davantage de ce mode de communication.


Les circonstances si difficiles dans lesquelles se débattait la défense nationale, en 1870-1871, ne permirent donc pas de tirer grand parti des essais qui avaient été faits, en plusieurs points du territoire, des appareils de télégraphie optique ; mais au retour de la paix, ces mêmes expériences furent reprises, et la télégraphie optique est aujourd’hui une création scientifique des plus intéressantes, des plus utiles et tout à fait pratique. Les Anglais en ont fait un grand usage dans leurs campagnes dans l’Afghanistan, dans le Soudan et l’Égypte. Dans notre guerre de Tunisie, la télégraphie optique a rendu de grands services, et aujourd’hui en Tunisie, comme en Algérie, elle sert à établir des correspondances entre les corps de troupe. Notre corps expéditionnaire du Tonkin et de l’Annam est muni de