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« Ce qui porte à 5fr,15 centimes le prix des matières rigoureusement nécessaires à la production de 1 kilogramme d’aluminium. »

Les lignes qui précèdent exposent nettement l’état actuel de la question qui vient de nous occuper. M. Deville ne présente point l’aluminium comme destiné à remplacer l’or et l’argent dans leurs précieux usages. À ses yeux, il tient un rang intermédiaire entre les métaux précieux et les métaux oxydables, tels que le cuivre et l’étain. Mais il est certain que, même réduit à ce rôle intermédiaire, l’aluminium, s’il était à bas prix, serait encore une acquisition des plus précieuses pour l’industrie et l’économie domestique, et qu’il nous rendrait, dans une foule de cas, de très-importants services.

Arrivons aux applications industrielles de l’aluminium. L’Angleterre parut un moment vouloir s’en accommoder. Le peu de dureté de l’aluminium, la facilité avec laquelle on le travaille, la possibilité de mélanger sa nuance propre avec celle de l’or, parurent devoir assurer son introduction dans l’orfévrerie, chez nos voisins. Cependant cette faveur fut de courte durée ; l’orfévrerie anglaise ne tarda pas à abandonner le nouveau métal. L’orfévrerie française ne l’avait jamais sérieusement adopté. Aujourd’hui l’aluminium ne sert plus que pour certains cas très-limités, par exemple pour former les corps de lorgnettes, qu’il faut légers et solides, ou des instruments de précision, et surtout pour les divisions du gramme. Sa légèreté permet de fabriquer un centigramme sous la forme d’un cylindre surmonté d’un bouton.

L’activité des chercheurs ne fut point lassée par l’échec qu’avaient éprouvé les applications de l’aluminium. Elle se tourna vers les alliages de ce métal.

Ce fut l’alliage d’aluminium et de cuivre qui prévalut. Cependant les premiers essais furent infructueux, l’alliage était trop dur et paraissait trop difficile à travailler. C’est à M. Paul Morin que revient l’honneur d’avoir résolu les problèmes qu’offraient la fabrication industrielle du bronze d’aluminium et ses applications à l’industrie.

On a pu voir, à l’Exposition universelle de 1867, dans deux magnifiques vitrines de M. Paul Morin, les plus beaux spécimens de bijouterie, d’orfévrerie religieuse et de table, d’objets de fantaisie et de création d’art.

C’est à l’usine d’Alais que s’effectue la préparation du bronze d’aluminium. L’opération est fort simple ; elle se réduit à mélanger par la fusion, dans un creuset, les deux métaux purs. Dans le cuivre fondu, on jette des lingots d’aluminium ; on agite la masse avec un ringard, et on la coule dans des lingotières.

Le bronze d’aluminium, tel est le titre que cet alliage a reçu dans l’industrie, peut être fabriqué à des titres divers, suivant les usages auxquels on le destine. Mais le meilleur, par l’ensemble de ses propriétés, est composé de 90 parties de cuivre et de 10 parties d’aluminium. Les vases sacrés, l’orfévrerie de table et la bijouterie sont aujourd’hui exclusivement fabriqués avec cet alliage, qui est le plus dur, le plus rigide, le plus tenace et le moins altérable.

Cet alliage offre un grain extrêmement fin, qui se prête à un poli remarquable et aussi agréable que la dorure.

Le bronze d’aluminium présente une grande homogénéité, qualité assez rare dans les alliages. On sait que le bronze des canons, par exemple, laisse écouler une partie de son étain longtemps avant que la masse entière entre en fusion : c’est ce qu’on nomme liguation. Le bronze d’aluminium ne présente pas ce phénomène fâcheux ; ses éléments constituants ne se séparent jamais par la fusion.

La malléabilité et la ductilité du bronze d’aluminium sont considérables. Il se forge à froid, en se récrouissant fortement sous l’action du marteau, ce qui lui donne la dureté et l’élasticité. À chaud il se forge