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supérieure k. Dès lors, les deux branches KK sont forcées de se rapprocher par le haut, et nécessairement aussi de s’écarter par le bas, en pivotant autour des boulons l, l. Elles laissent donc échapper la tête o de la tige à coulisse qui porte le trépan, et le trépan, abandonné à lui-même, est précipité au fond du sondage. La sonde venant à redescendre, la pince se trouve de nouveau en contact avec la tête o. Au moment où le balancier de la machine à vapeur relève les tiges, l’eau presse de nouveau sur le chapeau de gutta-percha, de haut en bas ; les branches de la pince se rapprochent et saisissent la tête o, et le trépan remonte avec les tiges.

Ainsi, cet organe remarquable venait alternativement saisir et relâcher, un énorme trépan pesant 1 800 kilogrammes. Soulevée jusqu’à une hauteur de 60 centimètres, cette masse retombait le long des glissoires, et à chaque oscillation du balancier de la machine à vapeur, elle venait frapper le sol. Aucune roche n’aurait pu résister à ce choc puissant, s’exerçant plusieurs fois par minute.

Dans le système Kind, la chute du trépan s’opère donc tout à fait indépendamment de celle des tiges, et les inconvénients des sondes rigides à de grandes profondeurs disparaissent complétement. Nous avons dit comment M. Mulot, faute d’un procédé de ce genre, avait été contraint de renoncer à la méthode de percussion, dès la profondeur de 341 mètres ; dans le forage de Passy, on put se servir du trépan jusqu’à la rencontre de la nappe jaillissante. La coulisse d’Œynhausen, que nous avons décrite plus haut (page 560, figure 358) était un acheminement vers cet appareil ; mais elle ne réalisait qu’imparfaitement les conditions de la chute libre, car son emploi ne provoque pas la séparation réelle de l’instrument perforateur et des tiges ; M. Kind a donc le premier, résolu complétement ce problème.

Ce n’est pas à dire que son appareil soit sans défauts. Parfait de tous points dans les terrains solides, où l’alésage est régulier et où le chapeau de gutta-percha fonctionne aussi bien qu’un piston dans le cylindre d’une machine à vapeur, il laisse à désirer dans les couches tendres, où le remous de l’eau dégrade les parois du trou de sonde et l’élargit de telle sorte, que l’eau, pouvant se frayer un passage autour du clapet, cesse d’exercer sur celui-ci une pression suffisante pour le soulever et ouvrir la pince à déclic. Il arrive donc assez souvent que la sonde monte et descend sans lâcher le trépan.

Le mécanisme imaginé par M. Kind n’en reste pas moins très-remarquable. Il fonctionne assez rapidement pour que le trépan tombe environ 20 fois par minute, d’une hauteur de 0m,60, lorsque le trou de sonde est alésé bien régulièrement ; dans le cas contraire, le nombre de coups ne dépasse pas 12 ou 15[1].

Aussi longtemps que dure le battage, deux ouvriers, placés sur le plancher de manœuvre, sont occupés après chaque coup, l’un à tourner vers le haut la vis qui soutient la sonde, afin d’augmenter la longueur des tiges à mesure que le trou s’approfondit, l’autre à faire tourner cette tige elle-même d’un huitième de circonférence, en agissant sur la barre transversale, afin d’amener les dents du trépan sur tous les points de la roche.

La figure 385, avec sa légende, donnera au lecteur une idée exacte des différentes phases qu’avait à parcourir le travail de la machine et des ouvriers dans le forage du puits de Passy.

La quantité de travail utile accomplie par l’outil perforateur, à Passy, variait nécessairement avec la nature des couches à traverser. Pendant les quatre premiers mois, chaque séance de battage, dont la durée était de six heures environ, produisit un avancement moyen de 1m,28 ; pendant cer-

  1. MM. Degousée et Laurent ont perfectionné ce système de déclic, et l’emploient avec avantage dans leurs travaux. Leur appareil étant fondé sur le même principe que celui de l’ingénieur saxon, nous nous dispenserons de le décrire.