Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 4.djvu/43

Cette page a été validée par deux contributeurs.

mais, qui était restée sous la Restauration ce qu’elle était sous la République, et qui est encore aujourd’hui ce qu’elle était autrefois.

Le brevet d’invention de Carcel expira à la même époque, c’est-à-dire en 1816, et la lampe mécanique tomba dans le domaine public. C’est alors que la fièvre des fabricants s’en donna à cœur joie, pour perfectionner la lampe mécanique, c’est-à-dire pour créer quelque modification secondaire, plus ou moins efficace, qui, sauvegardée par un brevet de perfectionnement, leur permettait de vendre à leur profit exclusif le nouveau type. Ainsi naquirent les lampes de Carreau, de Gagneau, des frères Levasseur, de Rimberg, de Dalli, de Gotten, etc. De toutes ces modifications, trois seulement ont survécu : la lampe de Gagneau, que fabriquent encore les fils de Gagneau, l’inventeur des suspensions pour les salles à manger, et la lampe de Gotten, véritable perfectionnement du mécanisme de la lampe Carcel ; nous parlerons plus loin de ces deux appareils. On peut leur adjoindre la lampe de Rimberg, qui rendit millionnaires les lampistes qui l’exploitaient, pendant que l’inventeur mourait sans fortune à Villers-Cottrets.

La lampe primitive de Carcel, la lampe originaire, invention vivace, est néanmoins toujours debout. La noblesse et la riche bourgeoisie lui sont restées fidèles. Dans tous les châteaux de France, la lampe Carcel éclaire encore le whist de la douairière ou le trictrac du marquis. Dans la bourgeoisie, la lampe Carcel est un meuble de famille, qui se transmet de père en fils, et auquel se rattachent quelques souvenirs de noce, de baptême ou de réjouissance. Les enfants conservent et entretiennent avec respect le vieux carcel, souvenir précieux d’une mémoire chérie.

Nous avons dit que l’ancienne boutique de Guillaume Carcel, telle qu’elle existait sous le premier Empire et sous la Restauration, se trouve encore aujourd’hui dans la rue de l’Arbre-Sec. Elle est dirigée par le gendre de Carcel, M. Hippolyte Châtelain. On voit dans l’étalage un instrument qui présente un grand intérêt pour l’histoire des inventions de notre époque. C’est le premier modèle de la lampe mécanique que Carcel avait essayée. L’air chaud, qui se dégage du verre de la lampe, y sert à mettre en mouvement le mécanisme par lequel l’huile est élevée jusqu’au bec. Sur une autre lampe, se trouve une horloge, construite également par Carcel, et dont les aiguilles sont mises en action par le même mécanisme qui sert à élever le liquide combustible.

On ne peut voir sans ressentir un attendrissement secret, ces curieux témoignages historiques des premiers efforts de l’inventeur de la lampe mécanique. Il existe au Ministère de l’intérieur, un Comité de conservation des monuments historiques, qui a pour mission de veiller à la conservation des restes mutilés des monuments antiques. Un temps viendra où les nations se feront un pieux devoir de recueillir et d’honorer les débris précieux où revivra le souvenir des inventions utiles de la science et des arts. Et combien ces vestiges matériels de travaux qui ont concouru au progrès de l’humanité, seraient plus touchants à contempler que les monuments de l’antiquité romaine ou grecque, époque barbare et justement oubliée !


CHAPITRE VI

modification apportée à la lampe carcel par gagneau.

Les dispositions mécaniques employées par Carcel pour élever l’huile jusqu’au bec, étaient aussi ingénieuses qu’élégantes ; aussi n’a-t-on rien changé, depuis l’inventeur, au principe de sa lampe. Le mouvement d’horlogerie qu’il avait adopté, a toujours été conservé ; les perfectionnements qui furent apportés à ce système, quand il tomba, à l’ex-