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Puebla, dont la famille impériale se servait pour ses promenades sur la Seine, on fit l’essai du chauffage de la chaudière au moyen de l’huile de pétrole. L’amiral Rigault de Genouilly, ministre de la marine, le général Lebœuf, quelques officiers d’ordonnance de l’Empereur et de l’Impératrice ; M. Dupuy de Lôme, directeur du matériel du ministère de la marine ; M. Sainte-Claire Deville, professeur de chimie à la Sorbonne, que l’Empereur a chargé de s’occuper de cette question au point de vue chimique, et le commandant, M. Lefèvre, se trouvaient à bord du Puebla, accompagnant l’Empereur et l’Impératrice. L’expérience fut aussi longue et aussi décisive qu’on pouvait le désirer. Pendant quatre heures le Puebla descendit et remonta la Seine, du pont Royal à Boulogne, et les résultats constatés, tant pour la vitesse de la marche que pour l’absence de la fumée et la régularité de la combustion, ne laissèrent rien à désirer.

L’huile de pétrole dont on fait usage comme combustible, n’est point de ces huiles légères dont la grande volatilité exposerait à des dangers énormes ; c’est de l’huile lourde, d’une densité de 1,04, et qui ne peut s’enflammer spontanément, mais seulement quand elle est chauffée à une température assez élevée. Cette huile est contenue dans un réservoir, d’où elle descend, par son propre poids, dans un tuyau, muni d’abord d’un seul robinet, placé au-dessus de la grille du foyer. Arrivé en ce point, le tuyau se divise en treize petits tubes, munis chacun d’un robinet, et qui déversent un filet d’huile le long de chaque barreau d’une grille de fer, disposée verticalement dans le foyer. Le grand robinet sert à modérer ou à arrêter le débit de l’huile ; les treize petits robinets règlent l’écoulement des filets du liquide combustible.

L’huile coule donc le long des barreaux d’une grille verticale posée au milieu du foyer, et elle y brûle régulièrement. L’intérieur du foyer est composé de briques formant une voûte. Au milieu est une espèce d’autel en briques, destiné à augmenter la surface de chauffe. Cette surface de chauffe est, sur le Puebla, de 13 mètres carrés.

Pour mettre le foyer en train, alors qu’il n’existe encore aucun tirage, et pour amener le volume d’air nécessaire à la combustion, on fait marcher, à bras d’homme, un ventilateur, qui insuffle l’air nécessaire au commencement de la combustion. Pour produire en même temps un appel d’air, à l’intérieur de la cheminée, on dirige dans cette cheminée, le jet de vapeur qui sort des cylindres de la machine à vapeur, ainsi qu’on le fait dans les locomotives. Quand la combustion est établie, le tirage se fait naturellement, et le ventilateur devient inutile.

Toutefois, quand le bateau s’arrête, afin de maintenir le tirage du foyer, et d’empêcher que les flammes ne retournent en arrière, on fait arriver à l’intérieur de la cheminée, une sorte de tuyau soufflant, analogue à celui des locomotives. C’est un jet de vapeur, emprunté cette fois, non aux cylindres à vapeur, qui ne sauraient en fournir puisque la machine est arrêtée, mais à la chaudière elle-même, au moyen d’un petit tuyau partant de son dôme.

Sauf ces deux artifices, le chauffage avec le pétrole se fait tout aussi simplement et aussi régulièrement que le chauffage à la houille. Ce système a, en outre, le grand avantage de ne produire aucune fumée, ce qui n’est jamais indifférent, pas plus pour la machine d’un bateau à vapeur, que pour une machine fixe d’usine.

L’expérience du 8 juin 1868 mit en évidence l’identité de force de la machine du Puebla, que la chaudière soit chauffée avec de l’huile minérale ou avec de la houille. On s’était assuré que la chaudière du Puebla faisait développer à la machine une force de 63 chevaux, mesurée sur le piston, avec 240 tours du volant par minute, sous une pres-