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nait à constater le fait de sa découverte, M. Hill la rejeta, sous ce prétexte qu’il avait juré de ne montrer ses spécimens à personne, de peur que la vue d’une seule épreuve ne fit découvrir son procédé.

Comme l’inventeur ne paraissait arrêté que par la crainte de perdre le bénéfice qu’il attendait de ses travaux, un praticien de New-York résolut de lui enlever ce dernier genre de scrupules. Le Photographic Journal publia une lettre d’un photographe, M. Anthony, qui proposait d’ouvrir, dans toutes les villes des États-Unis, une souscription, dont le chiffre serait fixé par M. Hill même. Une fois ce chiffre atteint, la somme demandée par l’inventeur lui serait remise, après constatation, par un jury compétent, de la réalité de sa découverte. En acceptant cette proposition, M. Hill pouvait tout à la fois s’assurer une grande fortune et contribuer au progrès de son art. Or, il la déclina catégoriquement.

À dater de ce jour, les photographes des États-Unis se sont tenus pour rassurés, et, s’applaudissant d’avoir échappé au danger qui avait paru un moment menacer leur industrie, ils ont repris le chemin de leurs ateliers, en répétant entre eux le titre de la pièce de Shakespeare : Much ado about nothing (Beaucoup de bruit pour rien).


CHAPITRE X

description des opérations pratiques de la photographie. — impression dans la chambre obscure. — développement. — fixage. — tirage de l’épreuve positive. — procédé au collodion humide. — épreuve négative, épreuve positive.

Le lecteur a été suffisamment initié, par ce qui précède, à l’historique et aux principes généraux de la photographie. Il nous reste à décrire les moyens qui sont suivis aujourd’hui pour obtenir les épreuves.

Nous parlerons d’abord des opérations à exécuter, ensuite des appareils optiques qui sont employés en photographie.

Nous avons dit, plusieurs fois, que les sels d’argent, naturellement incolores, particulièrement le bromure, le chlorure et l’iodure d’argent, étant exposés à l’action de la lumière solaire ou de la lumière diffuse, noircissent, par suite d’une modification chimique ou physique provoquée dans leur substance, par la lumière. D’après cela, si l’on place au foyer d’une chambre noire, une surface imprégnée d’iodure d’argent, une feuille de papier, par exemple, l’image formée par l’objectif s’imprimera sur le papier, parce que les parties éclairées noirciront, et noirciront d’autant plus qu’elles recevront plus de lumière, tandis que les parties obscures, soustraites à l’influence lumineuse, laisseront au reste du papier sa blancheur.

L’empreinte, ainsi obtenue, n’est que très-peu visible au moment où l’on retire la feuille de papier de la chambre obscure. On la fait apparaître à l’aide de certains agents chimiques, qu’on nomme, pour cette raison, révélateurs : tels sont l’acide gallique, l’acide pyrogallique et le sulfate de fer.

Une pareille image ne pourrait être conservée en plein jour, car le papier est encore imprégné d’iodure d’argent non décomposé, qui noircirait à la lumière. Il faut donc le débarrasser de ce sel d’argent. On y parvient en plongeant l’épreuve dans une dissolution d’hyposulfite de soude ou de cyanure de potassium ; le sel d’argent non impressionné par la lumière est dès lors enlevé. Cette opération s’appelle fixage.

On obtient ainsi une espèce de silhouette (fig. 28) dans laquelle les parties éclairées du modèle sont représentées par une teinte noire, et les ombres par des blancs ; c’est ce que l’on nomme une image négative.

Maintenant, si l’on place cette image négative sur une feuille de papier imprégnée de chlorure d’argent, et que l’on expose le tout à l’action du soleil, ou de la lumière diffuse, l’épreuve négative laissera passer le jour à tra-