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tirage des positifs. Ainsi fut créée la méthode du tirage des positifs inaltérables au charbon.

Mais là ne se sont pas bornées les applications de la découverte de M. Poitevin. La gravure des épreuves photographiques en a été la conséquence.

Fig. 24. — M. A. Poitevin.

M. Poitevin lui-même est entré le premier avec éclat dans cette voie, qui a ouvert un horizon imprévu à la photographie. Il a, le premier, donné la solution du problème général de la gravure héliographique. M. Poitevin créa la photo-lithographie, c’est-à-dire l’art de transporter sur pierre une épreuve photographique, et de la tirer avec l’encre lithographique, comme une lithographie ordinaire.

Sur une pierre convenablement grainée, on dépose un mélange d’albumine et de bichromate de potasse ; on place par-dessus le cliché négatif sur verre, d’une épreuve photographique, et on expose le tout à la lumière. La lumière modifie les parties de la pierre gélatinée qu’elle touche, de telle façon que l’encre ne pourra adhérer que sur les parties éclairées. L’encrage et le tirage s’opèrent ensuite comme pour une lithographie ordinaire.

M. Poitevin fit aussi cette autre découverte importante, que la gélatine mélangée de bichromate de potasse, ne peut plus se gonfler par l’eau, lorsqu’elle a été frappée par la lumière, tandis que les parties non influencées par l’agent lumineux, se gonflent rapidement en absorbant l’eau. En prenant une empreinte de cette gélatine ainsi gonflée inégalement, et reproduisant ce moulage de gélatine en une planche de cuivre, grâce aux procédés galvanoplastiques, on arrive à former d’assez bonnes planches pour la gravure ou la typographie.

La méthode de M. Poitevin, pour la gravure photographique, repose donc sur la propriété que possède la gélatine imprégnée de bichromate de potasse, et soumise ensuite à l’action de la lumière, de perdre la faculté de se gonfler dans l’eau, tandis que la gélatine ainsi préparée, mais non impressionnée par l’action lumineuse, se gonfle considérablement (au point d’augmenter d’environ six fois son volume), quand on la plonge dans l’eau.

La curieuse modification subie, dans cette circonstance, par la gélatine imprégnée de bichromate de potasse, tient à ce que les sels d’acide chromique, et surtout les bichromates, quand ils sont mêlés à des substances organiques, s’altèrent chimiquement au contact des rayons lumineux, l’acide chromique passant, sous cette influence, à l’état d’oxyde de chrome. L’acide chromique, réduit par l’action de la lumière et changé en oxyde de chrome, transforme la gélatine en une substance particulière, qui diffère de la gélatine ordinaire en ce qu’elle n’est pas pénétrable par l’eau et, par conséquent, n’est pas susceptible de se gonfler par l’absorption de ce liquide.

Grâce à la propriété du mélange qui vient d’être décrit, M. Poitevin transporte à volonté une épreuve photographique sur une pierre lithographique ou sur une lame de