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juxtaposés, mais la pente n’était jamais régulière. À partir de 1854, M. Fowler présenta aux divers concours de drainage qui eurent lieu en Angleterre, des appareils supérieurs au précédent. Dans un concours agricole tenu à Paris, en 1856, le jury international fut chargé d’examiner le travail d’une charrue de drainage à vapeur de M. Fowler. L’expérience se fit à Trianon le 6 juin. L’appareil se composait de deux parties : la charrue proprement dite, et le moteur, qui était une locomobile puissante. Ces deux parties étaient réunies par un câble. Le câble en s’enroulant sur un tambour, entraînait la charrue, qui laissait seulement une trace « analogue, dit M. Barral, à la fente produite par un couteau dans un pain de beurre[1]. » Tous les 40 ou 50 mètres on creusait un trou dans le sol, pour attacher les uns aux autres les chapelets de tuyaux. La traction que la machine à vapeur exerçait sur le grand câble, fut évaluée à 8 000 kilogrammes.

Cependant l’expérience de Trianon n’était pas décisive, et son succès fut loin d’être complet. La charrue ne put franchir un banc rocheux, qui la renversa. Le poids énorme de l’appareil et son prix considérable étaient aussi de graves défauts. Le jury décerna, néanmoins, une médaille d’or à M. Fowler. Il voulut en cela récompenser le génie inventif appliqué à l’art agricole, mais non couronner la solution d’un problème qu’on cherchera peut-être vainement à résoudre.

En effet, il est bien difficile de concevoir une machine exécutant à elle seule toutes les opérations du drainage : l’inégalité des niveaux du sol opposera toujours les plus grands obstacles à la pose régulière et efficace des tuyaux.

Il est, toutefois, une partie des opérations qui peut aisément s’exécuter sans le concours de la main de l’homme : nous voulons parler de l’ouverture des tranchées et de leur remplissage. Le premier creusement des tranchées peut se faire, en effet, non sans quelque avantage, au moyen de la charrue rigoleuse de l’École d’agriculture de Grignon. Cette charrue est en bois. La coutelière est armée de deux coutres, dont l’un, celui de droite, se place dans les trous une fois pratiqués, de manière à faire varier la largeur de la rigole. Un régulateur sert à régler la profondeur du sillon souterrain. On obtient par une seule allée, une profondeur de 0m,25 à 0m,30, et en faisant passer la charrue deux ou trois fois dans le même sillon, on augmente la profondeur.

Si l’on faisait succéder au travail de cette charrue, ou d’une autre de même espèce, le travail d’une charrue fouilleuse du sous-sol, par exemple celle de John Read, on pourrait pousser le défoncement de la tranchée jusqu’à 0m,50 ou 0m,60. Au reste, on possède en France plusieurs charrues fouilleuses très-convenables pour exécuter le travail dont nous parlons. Telle est celle de M. Gustave Hamoir qui est toute en fer.

Jusqu’ici la charrue n’a fait que remplacer la bêche pour l’exécution de la tranchée, car on fait les déblais à la pelle. M. Paul, dans le comté de Norfolk, ne s’est pas contenté d’imaginer une machine pour ameublir le sol, il lui a fait aussi effectuer le déblai. Une roue armée de dents est destinée à piocher la terre. Cette roue est mise en mouvement par une chaîne s’enroulant sur un cabestan, mû par un manège à chevaux. Une chaîne-levier permet d’élever et d’abaisser la roue fouilleuse. En même temps que la roue avance, entraînée par la chaîne, elle fouille le sol, le soulève, et jette la terre sur un des côtés de la tranchée. On peut, avec cet instrument, pratiquer une tranchée de 0m,91 à 1m,52 de profondeur et de 0m,40 de largeur, sur une longueur d’environ 1m,22 par minute.

Nous nous bornons à signaler ces divers appareils mécaniques sans nous y arrêter da-

  1. Voir la description de ce remarquable système dans l’ouvrage de M. Barral, Drainage des terres arables, t. II, pages 359 et suivantes.