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précision extraordinaires, le spectacle changeant, les aspects variés, du paysage extérieur. Mais ces tableaux si parfaits n’étaient qu’une fugitive empreinte, qui s’évanouissait avec la clarté du jour. Trois siècles durant, on les considéra d’un œil d’envie, avec le regret de n’en pouvoir fixer la trace éphémère : le petit nombre de physiciens qui, dans ce long intervalle, avaient essayé d’aborder un tel problème, avaient reculé tout aussitôt, effrayés et comme honteux de leur audace. Plus tard, la physique et la chimie naissantes vinrent s’exercer tour à tour sur cet objet difficile. Le physicien Wedgwood, le chimiste Humphry Davy, tentèrent de mettre à profit, pour fixer et conserver les images de la chambre obscure, la modification que les composés d’argent subissent au contact des rayons lumineux. Mais Wedgwood et Davy furent contraints l’un après l’autre d’abandonner l’entreprise.

Tout espoir sous ce rapport semblait donc à jamais perdu, lorsque tout à coup vint à circuler un bruit étrange. Un homme s’était rencontré qui avait résolu le problème extraordinaire de fixer à jamais les dessins de la chambre obscure. Cet homme, cet artiste habile s’il en fut, c’était Daguerre. Jamais la science n’avait remporté une aussi brillante victoire ; jamais preuve aussi merveilleuse de son pouvoir n’était venue s’offrir à l’admiration de tous. On ne peut se faire une idée du concert d’acclamations enthousiastes qu’excita l’annonce de cette découverte imprévue.

Tout n’était pas dit néanmoins, car bientôt la rapide série des perfectionnements apportés à l’art photographique, vint ajouter encore à l’admiration qu’avaient provoquée ses débuts.

Quand les produits du daguerréotype furent connus pour la première fois, c’est à peine si l’on osait s’attendre à les voir s’enrichir de quelques progrès importants. Cet étrange problème de fixer l’image des objets extérieurs par l’action spontanée de la lumière, paraissait alors résolu d’une manière si complète, qu’exiger des perfectionnements nouveaux, semblait, à cette époque, une injustice et comme une offense envers l’inventeur. Cependant, les améliorations progressivement apportées à la méthode primitive, changèrent peu à peu la face entière de la photographie ; de telle sorte que les résultats obtenus à l’origine, ne devaient plus être considérés que comme les ébauches de l’art.

L’empreinte du dessin photographique, d’abord si légère et si fugace que le souffle d’un enfant aurait suffi pour l’enlever, fut bientôt fixée d’une manière inaltérable. Le miroitement métallique, qui ôtait tant de charme à ces images, disparut en grande partie, et le trait acquit, en même temps, une netteté incomparable. Grâce aux procédés électro-chimiques, l’or, le cuivre ou l’argent, déposés en minces pellicules, prêtèrent des tons séduisants à ces petits tableaux. Grâce à l’emploi des agents accélérateurs, les épreuves qui, au début, exigeaient un quart d’heure d’exposition à la lumière, purent s’obtenir en quelques secondes.

Bientôt, cet art, déjà si merveilleux, entra dans une phase nouvelle. Le vœu, tant de fois exprimé, d’obtenir sur le papier les images photographiques, fut rempli avec un entier bonheur, et la découverte de procédés irréprochables pour l’exécution de la photographie sur papier, vint marquer un pas de plus dans cette carrière de précieuses inventions. Vint ensuite la méthode des agrandissements et des réductions, qui permit d’amplifier démesurément une épreuve, ou de la réduire à de si microscopiques dimensions qu’on put porter sur une bague, une image ou un portrait, et que l’on put entendre crier par les rues : La vue photographique de l’Exposition de 1867, sur une tête d’épingle !

Enfin une découverte fondamentale, objet de tous les vœux, est venue terminer cette