Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 3.djvu/593

Cette page a été validée par deux contributeurs.

duisait sans engrais, plus qu’une terre fumée et non drainée. Plusieurs fermiers annonçaient qu’ils aimaient mieux payer 5 à 6 pour 100 de plus sur leur fermage, et avoir à travailler des terres drainées. D’autres prétendaient même qu’ils ne voudraient pas prendre à ferme gratis une terre non drainée.

L’État fit ses dernières avances en 1850, et rentra peu à peu dans les sommes qu’il avait prêtées.

Aujourd’hui le drainage est un fait accompli en Angleterre, et dans certains districts il existe dans presque toutes les terres. Depuis 1842, époque où l’amélioration du sol commença de s’opérer avec méthode, la Grande-Bretagne a drainé, savoir : en Irlande (tant sur les terres de l’État que sur celles des particuliers) 80 000 hectares ; en Angleterre, en Écosse et dans le pays de Galles, 552 000 ; en sorte que dans le Royaume-Uni tout entier, il existe une somme totale de 632 000 hectares drainés.

Pendant que ce grand travail, qui fait tant d’honneur à l’Angleterre, se produisait, de l’autre côté du détroit, que faisait la France ? Elle prêtait l’oreille, non sans quelque méfiance, à tous les bruits du dehors. Peu disposée aux innovations en agriculture, elle s’en tenait à la routine. C’est un Anglais, M. Thackeray, qui, le premier, fit connaître en France, les avantages que l’Angleterre retirait du drainage. M. Thackeray publia, sur ce sujet, plusieurs brochures, et écrivit de nombreux articles dans les journaux d’agriculture. En 1846, il fit venir de Londres, à ses frais, six mille tuyaux de drainage et deux ouvriers, pour faire des expériences dans le domaine de Forges, près Montereau.

Ces expériences furent couronnées de succès. Peu de temps après, M. Thackeray importait une machine pour fabriquer des tuyaux et le modèle d’un four pour les cuire économiquement. À l’exposition des produits de l’industrie nationale de 1846, M. Thackeray obtint du Jury des récompenses, une médaille d’argent.

Fig. 413. — Olivier de Serres.

Cependant la France agricole conservait toujours son immobilité et son indifférence. Un petit nombre d’agriculteurs distingués avaient entrepris quelques travaux de drainage ; mais ils ne l’avaient fait qu’avec hésitation et sur de petites étendues de terrain. Les demandes de tuyaux n’étaient pas suffisantes pour encourager la fabrication des potiers et des tuiliers, qui hésitaient à créer des machines et un outillage pour des produits dont le succès ne leur était pas garanti.

Les progrès du drainage auraient sans doute été fort lents parmi nous, sans l’intervention, libérale et éclairée, du Gouvernement. Encouragé par les résultats heureux de la grande entreprise qui venait de se faire en Angleterre, le gouvernement français résolut d’entrer dans la même voie. À partir de l’année 1849, il mit à la disposition des comices agricoles et des départements quelques sommes pour l’achat des machines à fabriquer