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En 1814, Dreyse retourna à Sœmmerda. Il prit la direction de l’atelier de son père, et fonda, quelque temps après, une fabrique de capsules fulminantes pour la chasse. C’est en travaillant au perfectionnement des capsules fulminantes, qu’il conçut l’idée de les introduire dans la cartouche même, et d’enflammer le fulminate par le choc d’une aiguille à ressort.

Le premier fusil à aiguille, construit par Dreyse en 1827, se chargeait par la bouche du canon. Cette disposition fut bientôt perfectionnée en plusieurs points essentiels, et Dreyse obtint, au mois d’avril 1828, un brevet de huit ans pour son aiguille-ressort et sa cartouche fulminante.

Fig. 371. — Dreyse, inventeur du fusil à aiguille.

Vers la fin de 1829, Dreyse eut l’occasion d’expliquer le principe de son invention au prince royal Frédéric-Guillaume de Prusse. Ce prince s’y intéressa vivement, et ne cessa de favoriser les recherches de l’habile armurier. Devenu roi, Frédéric-Guillaume dota son armée du nouveau fusil.

Dreyse n’eut pas à se plaindre, comme beaucoup d’inventeurs, de l’ingratitude de ses concitoyens. Il fut appelé par le gouvernement, à remplir différentes fonctions officielles, et en 1864, le roi lui accorda des lettres de noblesse. Il est mort le 9 décembre 1867, à l’âge de 80 ans, entouré d’une nombreuse famille.

Entre les premiers essais du fusil à aiguille qui remontent à 1827 et le modèle actuel adopté par l’armée prussienne, et que nous venons de décrire, il s’est donc écoulé quarante années, qui ont été employées en recherches et en expériences incessantes.

C’est vers 1836 que le chargement par la culasse fut appliqué pour la première fois au fusil à aiguille, par Dreyse. Depuis cette époque, bien d’autres perfectionnements ont été successivement appliqués, et lui ont donné peu à peu la forme commode et avantageuse qu’il possède aujourd’hui.

C’est en 1841, qu’on adopta, en Prusse, un premier modèle définitif pour la fabrication en grand du fusil à aiguille. Le roi Frédéric-Guillaume IV commanda, à cette époque, soixante mille fusils de ce modèle, à la fabrique de Sœmmerda. Vers 1848, tous les bataillons de fusiliers des trente-deux régiments de ligne prussiens étaient armés du nouveau fusil, qui ne tarda pas à faire ses preuves pendant l’insurrection badoise, comme aussi dans la première campagne du Schleswig-Holstein.

Après cette campagne, la nouvelle arme fut introduite peu à peu dans toute l’infanterie et toute la cavalerie prussiennes. La landwehr même en fut pourvue.

La seconde campagne contre le Danemark, en 1864, mit en évidence la supériorité du fusil à aiguille sur les armes anciennes. Les Autrichiens qui combattaient alors à côté des Prussiens, purent voir par eux-mêmes, les effets de cette arme. Mais ils n’en furent pas sérieusement impressionnés. Il fallut le désastre de Sadowa pour leur ouvrir les yeux.