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On fit aussi l’essai de canons en fer forgé, mais ils ne répondirent pas aux espérances qu’ils avaient fait naître.

En même temps qu’on fixait les calibres des bouches à feu, on déterminait aussi les dimensions des principales parties de leurs affûts respectifs. On leur donna l’avant-train des affûts hollandais.

La figure 270 montre un canon monté sur son affût et pourvu de son avant-train. On y voit comment se relie à la pièce l’avant-train du timon destiné à la traîner.

Nous n’insistons pas sur les détails de l’affût, ce ne serait qu’une répétition de ce que nous avons dit à propos d’affûts déjà décrits.

À cette époque fut inventé l’obus, c’est-à-dire le projectile creux, qui, au lieu d’être lancé par le tir courbe, dans un mortier, est lancé par le tir horizontal d’une bouche à feu ordinaire. Sa forme était cylindro-conique, pour qu’il pût être chargé dans les pièces à âme longue.

Comme pour la bombe, on tirait l’obus à deux feux. La bombe était lancée sous des angles voisins de 45 degrés ; l’obus, au contraire, était tiré sous le même angle que les boulets, et par les mêmes bouches à feu. Telle est l’origine des obus modernes qui, partout aujourd’hui, sont substitués aux boulets pleins dans les bouches à feu rayées.

L’usage des obus ne prit pas tout d’un coup une grande extension, à cause de la difficulté et des dangers qu’il y avait à allumer la fusée au fond des pièces à âme longue.

On tourna alors la fusée du côté de la charge, et on expérimenta le tir à un seul feu. Mais, quelque solidement encastrée que fût la fusée, souvent le premier choc de la décharge poussait violemment la fusée dans l’obus, et ce projectile faisait explosion dans l’intérieur de la pièce.

Pour l’obus, comme pour la bombe, on était tout près de résoudre le problème ; il ne s’agissait plus de perfectionner ni de compliquer, il fallait simplement, dans le tir à un seul feu, placer la fusée en avant. Qui pouvait cependant supposer que cette fusée, quoique tournée vers l’extérieur, prendrait feu par l’explosion de la charge ? Ce fut probablement un artilleur distrait ou peureux qui reconnut ce fait le premier, et il dut rester tout surpris de la réussite. Quoi qu’il en soit, cette observation avait eu lieu déjà vers le milieu du xviiie siècle ; car De Vallière en fit usage en 1747, au siége de Berg-op-Zoom.

On connaissait et on employait alors les boulets rouges, que l’on tirait comme de nos jours, c’est-à-dire en plaçant, entre le projectile et la poudre, du gazon mouillé ou de la terre glaise fortement tassés. Saint-Rémy dit qu’on ne s’en servait que dans les calibres de 4 et de 8, parce que leur emploi eût été trop difficile dans les bouches à feu plus grandes.

On se servait aussi, à cette époque, de divers projectiles irréguliers, qui agissaient à courte distance : telles étaient les pommes de pin et les grappes de raisin.

Aujourd’hui les pommes de pin et les grappes de raisin ne sont plus en usage dans l’artillerie, elles sont remplacées par la boîte à balles, dont le principe d’action est le même. La boîte à balles est une enveloppe de fer-blanc, munie à ses deux bouts de deux plateaux de fonte, et renfermant non plus des balles de plomb, mais des balles de fer assez irrégulièrement coulées. Au moment de la décharge, le plateau postérieur, recevant une impulsion plus forte que le reste du projectile, presse sur les balles, déchire l’enveloppe, et le contenu s’éparpille au dehors. Il décrit une parabole, très-meurtrière pour l’infanterie, à petite distance, mais dont la portée n’excède guère quatre cents pas.