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constructions. Seuls, ils pouvaient rivaliser entre eux, pour le nombre des pièces fabriquées, et les innovations que l’art ne cessait d’y introduire.

Partagée en petites provinces, déchirée par les dissensions intestines, les factions religieuses et les invasions étrangères, l’Italie devint trop pauvre et trop affaiblie, pour que son artillerie pût jouer un rôle sérieux et tenir une place dans les événements politiques de l’Europe. Cependant vers la fin du xve siècle, le duc de Ferrare, ami et allié du roi de France, Charles VIII, copia son artillerie avec assez de succès. Le duc de Ferrare s’était fait lui-même fondeur, et il était devenu tellement habile dans cet art, que personne ne pouvait rivaliser avec ce royal artisan.

Le roi de France, Louis XII, refit son artillerie, en 1498, sur les modèles de celle de Charles VIII. Les Mémoires de Fleurange, nous ont conservé la composition de cette artillerie, au moment où les Français marchaient contre Gênes.

Le Musée d’artillerie de Paris possède un beau spécimen des canons de Louis XII. Cette pièce, qui se trouve dans la grande cour, porte au catalogue le no 23. Ornée de fleurs de lys sur sa volée, elle porte sur sa culasse un hérisson couronné, comme toutes les autres bouches à feu de Louis XII.

François Ier augmenta encore cette artillerie. On trouve plusieurs de ses pièces au Musée d’artillerie de Paris. Elles ressemblent beaucoup, du reste, à celles de son prédécesseur, et ne présentent aucun progrès particulier. Comme les canons de Louis XII, les bouches à feu du temps de François Ier ont quelquefois la volée parsemée de fleurs de lys ; sur la culasse, une salamandre couronnée remplace le hérisson.

Vint ensuite Henri II, qui voulut faire profiter l’artillerie française des progrès que Charles-Quint avait imprimés aux artilleries allemande et espagnole.

En décembre 1552, parut l’ordonnance de François Ier, qui fixe les calibres uniformes que devra présenter, à l’avenir, l’artillerie française. Ces calibres devaient être au nombre de six. Le plus grand lançait un boulet de 33 livres 4 onces ; le plus petit, un boulet de 14 onces. Le plus grand seul portait le nom de canon ; les autres, et par ordre de décroissance, s’appelaient grande couleuvrine, couleuvrine bâtarde, couleuvrine moyenne, faucon et fauconneau[1].

Nous donnons (fig. 222 à 227) les dessins des six calibres de l’artillerie de François Ier d’après un manuscrit de cette époque, qui a pour titre : Longueur, grosseur, poids et calibres des canons, etc., avec leurs figures. « Il est compris, dit M. Favé, dans un volume de la Bibliothèque impériale, fonds Saint-Germain, portant le no 374. » Ces pièces ont un bouton de culasse, mais elles n’ont pas d’anses comme les pièces de Charles-Quint, Les deux plus grandes seules sont lisses à l’extérieur, avec des renforts à la volée ; les autres sont taillées à pans. Elles ne portent aucun ornement. Non plus que celles de Charles-Quint, elles n’ont de ligne de mire.

Le canon avait 9 pieds 9 pouces 6 lignes de longueur, et pesait 5 300 livres ; son boulet, comme nous l’avons dit, avait 33 livres et 4 onces de poids. Cette pièce était traînée par vingt et un chevaux.

La grande couleuvrine avait 9 pieds 10 pouces de longueur, pesait 4 000 livres, lançait un boulet de 13 livres 2 onces, et était traînée par dix-sept chevaux.

La couleuvrine bâtarde était longue de 9 pieds, pesait 2 500 livres, lançait un boulet de 7 livres 2 onces, et avait un attelage de onze chevaux.

La couleuvrine moyenne pesait 1 200 livres, le faucon 700 livres, le fauconneau 410. La

  1. Toutes les désignations des pièces de l’ancienne artillerie furent tirées du nom de certains animaux redoutables : le serpent (serpentine), la couleuvre (couleuvrine), le faucon (faucon, fauconneau et sacre).