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crit de Paulus Sanctinus, le dessin d’un château fort assiégé (fig. 206). Une enceinte de muraille crénelée, ABCD, environne le château. Une seconde muraille, EF, existe à l’intérieur de la place, de telle sorte que si la première enceinte est emportée, l’assiégé pourra se défendre dans la seconde. Ce dessin paraît dater du xive siècle, car au premier plan, à droite, on remarque deux bombardes, G, H, de forme très-primitive, avec leurs affûts. Devant les bombardes est une palissade, II, destinée à garantir les artilleurs des traits de la place.

Plus en avant sont deux trébuchets, V, V. Entre ces deux trébuchets et le fossé est une palissade, LL, plus forte que la première, parce que les grosses pierres lancées des murailles peuvent arriver jusqu’à ce point.

Enfin, et sur le fossé même, qui, en ces deux endroits, est comblé par des fascines, sont deux ouvrages d’approche, M, N, du genre de ceux qui étaient nommés, à cette époque, chats ou chats-chasteils, truies, beffrois, fouines.

L’assiégeant construisait cette espèce de tour en bois, hors de la portée du trait ; puis il comblait le fossé de la place avec des fascines, et il recouvrait les fascines d’un plancher de bois, pour que le chat pût s’y avancer sur ses roulettes. On remplissait de soldats la machine roulante, et on la poussait jusqu’aux murs de la place. Il fallait alors ou que le chat fût détruit par les assiégés, ou que la ville fût prise.

On construisait des chats d’une hauteur prodigieuse. Ils avaient trois étages. L’étage inférieur servait aux gens qui attaquaient la muraille à coups de pic ; l’étage moyen, placé à la hauteur des créneaux, logeait les soldats qui devaient combattre corps à corps. Sur le plus élevé se tenaient les archers et les autres gens de trait, qui « grevaient » de traits les défenseurs de la place, pour leur faire déserter les murs.

Des constructions aussi hautes et aussi pesantes, ne pouvaient pas toujours se risquer sur les fascines ou sur la terre fraîchement jetée, dont on avait comblé le fossé. Le plus souvent elles s’arrêtaient au bord du fossé. Alors elles servaient à jeter sur les murs, des ponts-levis, par lesquels les hommes d’armes s’élançaient pour donner l’assaut.

Lorsque les assiégés voyaient construire un chat, ils réunissaient tous leurs efforts pour le détruire. Dès qu’il arrivait à portée, les trébuchets de la place lui lançaient leurs grosses pierres. On faisait de fréquentes sorties pour l’incendier ; mais ce dernier moyen échouait souvent, parce que les bois étaient recouverts de peaux de bœuf toutes fraîches.

À droite du dessin de Paulus Sanctinus (fig. 206) et au second plan, se voit une maison roulante, O, en bois, destinée à protéger les soldats qui vont attaquer la muraille, ou combler le fossé. Quelques-unes des maisons roulantes construites sur ce modèle, portaient, suspendue à une corde, une poutre pesante, garnie de fer à l’une de ses extrémités, laquelle lancée à force de bras, comme les béliers de l’antiquité, venait battre la muraille et l’ébranler, si bien qu’à la fin on réussissait parfois à ouvrir la brèche. On a retrouvé, de nos jours, dans de vieilles murailles, des sortes de voûtes solides, qui semblaient d’anciennes portes murées. La disposition des lieux ne permettant pas de croire qu’il y eût jamais eu de portes à ces places, on a été conduit à penser que cette disposition avait pour but d’empêcher que la muraille ne s’écroulât, alors que les poutres dont il vient d’être question, avaient fait brèche au mur à la manière du bélier antique, sans avoir abattu les pieds droits.

Un autre moyen d’approche très-usité au xive siècle, dans les siéges, était le pavais, ou pavois, qui, sous le nom de mantelet, se perpétua jusqu’au temps de Vauban. Il consistait en un grand bouclier plat, fait de planches réunies, et parfois recouvert de claies, de terre ou de fumier. Les soldats le