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lique. Insoluble dans l’alcool, il exige pour se dissoudre, 160 parties d’eau à 15°, et 14 parties d’eau bouillante ; il est donc à peu près insoluble dans l’eau.

Chauffé avec précaution, il devient rouge orangé à une température voisine de 300 degrés, puis reprend, par le refroidissement, sa couleur primitive. Il détone fortement entre 310 et 320 degrés. Il s’enflamme aussi, avec détonation, par l’approche d’un corps en ignition.

L’idée de consacrer le carbazotate de potasse à la composition d’une poudre de guerre appartient à Welter, qui, comme nous l’avons dit plus haut, consigna cette idée dans son mémoire publié en 1796.

Le caractère éminemment explosif du carbazotate de potasse était donc bien établi, et il semble étonnant que l’on n’ait réussi que de nos jours à faire servir ce composé à la préparation d’une poudre de guerre. Mais quand on approfondit la question, on ne tarde pas à reconnaître qu’il y avait de nombreuses difficultés à résoudre avant d’arriver à une application pratique. Il fallait, en effet : 1o étudier les phénomènes qui accompagnent la déflagration des carbazotates, tant à l’air libre que dans un espace limité ; 2o connaître et doser les divers produits résultant de ces déflagrations, établir des formules chimiques de la décomposition spontanée du carbazotate de potasse ; 3o déterminer quels étaient les corps à associer au carbazotate de potasse pour composer des poudres donnant le maximum d’effet utile ; 4o arriver à une fabrication pratique de ces poudres, avec les appareils en usage aujourd’hui pour la poudre noire ; 5o trouver enfin le moyen de modifier, de régler, et même d’atténuer complètement le pouvoir essentiellement brisant des carbazotates de potasse.

Un jeune chimiste, M. Désignolle, d’Auxerre, après de nombreuses et persévérantes recherches, est parvenu à surmonter successivement toutes ces difficultés. Voici les principaux résultats de ses expériences.

Le carbazotate de potasse, porté graduellement à une température de 300 degrés, peut subir l’action de cette température pendant plus de 48 heures sans déflagrer, sans que sa composition soit altérée, en un mot sans que ses propriétés physiques et chimiques soient modifiées. Il passe au rouge orangé vers 290 degrés, mais il reprend par le refroidissement sa belle couleur jaune. Il est insoluble dans l’alcool, et à peu près insoluble dans l’eau. Il ne détone pas sous l’action d’un choc même très-violent.

Ainsi que l’a annoncé Welter, le carbazotate de potasse détone comme la poudre à canon, au contact d’un corps en ignition, en laissant un fort dépôt de charbon ; mais il résulte des recherches analytiques de M. Désignolle, qu’il y a deux cas parfaitement distincts à considérer dans la déflagration du carbazotate de potasse.

1o À l’air libre, sa combustion est toujours accompagnée de gaz azote et de bioxyde d’azote, de vapeurs d’eau et d’acide cyanhydrique ; il reste comme résidu du charbon et du carbonate de potasse. C’est ce que représente cette équation chimique :

Ce qui veut dire que 1 équivalent chimique d’acide carbazotique produit, en brûlant, 1 équivalent d’azote, 1 équivalent de bioxyde d’azote, 4 équivalents d’acide carbonique, 1 équivalent d’eau et d’acide cyanhydrique, qui se dégagent. Le résidu solide est formé de 1 équivalent de carbonate de potasse et de 5 équivalents de charbon.

2o En vase clos, c’est-à-dire dans un espace limité, tel que l’âme d’une bouche à feu, par exemple, les produits résultant de la combustion, changent tout à fait de nature. À l’exception de l’acide carbonique, les gaz permanents subsistent seuls. On con-