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et changé en acide carbonique. La force explosive du pyroxyle est, d’ailleurs, notablement accrue par l’addition du salpêtre, car il présente dès lors une puissance 7 à 8 fois plus considérable, à poids égal, que la poudre de mine.

Nous avons scrupuleusement et impartialement exposé les inconvénients et les avantages qui se rattachent à l’emploi du coton-poudre. Quelle conclusion tirer de ces faits ? Faut-il croire que cette découverte, accueillie à son origine avec tant d’intérêt, soit destinée à s’ensevelir dans l’oubli ? Faut-il penser qu’après avoir éveillé tant d’espérances, elle n’aura créé pour nous que des dangers, sans nous laisser quelques avantages en échange ? Cette question, grave et complexe, impose nécessairement une réserve extrême. Il nous semble pourtant que, même dans l’état présent des choses, le pyroxyle présente une série d’avantages de nature à mériter l’attention. Une poudre absolument inattaquable par l’eau, — de propriétés et de composition constantes, — qui ne souille ni la main, ni les vêtements, ni les armes, — trois fois plus légère à transporter que l’ancienne poudre, puisqu’elle est trois fois plus puissante, — susceptible de subir, sans la moindre altération, les voyages par mer, — une poudre qu’on peut inonder dans un arsenal ou dans la cale d’un navire et lui rendre, plus tard, en la séchant, ses propriétés primitives, l’emporte assurément, sous bien des rapports, sur l’ancienne poudre, qui souille les mains, qui noircit les armes, que l’air humide altère, que l’eau détruit sans retour.

La supériorité du coton-poudre pour l’usage des mines et le sautage des roches, paraît d’ores et déjà établie. En 1847, le duc de Montpensier et le général Tugnot de Lanoye, directeur des poudres et salpêtres, avaient formé le projet d’établir plusieurs ateliers de fabrication de pyroxyle pour le sautage des roches ; la révolution de Février empêcha l’exécution de ce projet.

Quant à l’emploi du fulmi-coton dans les armes, il est certain qu’il existe ici des difficultés sérieuses ; cependant elles ne sont peut-être pas assez graves pour faire abandonner totalement les espérances conçues. Une étude approfondie et persévérante des faits nouveaux que ces questions soulèvent, pourra fournir un jour les moyens de modérer, de retarder, de régulariser l’explosion du pyroxyle, comme aussi de modifier sa préparation, de manière à éviter le fâcheux phénomène de sa décomposition spontanée.

Nous avons rapporté les résultats encourageants obtenus en Autriche par le général Lenk, en 1864, et ceux bien plus précis et bien plus décisifs, qui ont été communiqués à la Société royale de Londres, au mois de mars 1868, concernant les essais faits à l’arsenal de Woolwich. Un meilleur procédé de préparation du pyroxyle, et l’addition au produit conservé d’une faible quantité de carbonate de soude, paraissent avoir écarté les dangers que présentaient les pyroxyles préparés en Allemagne et en France, tant pour leur conservation dans les magasins, que pour leur transport et leur exposition au soleil.

Le baron Séguier a proposé, en 1864, de composer pour les bouches à feu et les fusils de munition, des charges mixtes de fulmi-coton et de poudre de mine, disposées de telle manière que la poudre de mine s’enflammât la première. L’effet brisant du fulmi-coton serait annulé grâce à ce mélange. En effet, la poudre de mine, dont la combustion est très-lente, s’enflammant la première, commencerait par détruire l’inertie du projectile, par l’ébranler et le déplacer, ensuite le fulmi-coton, en s’enflammant, imprimerait au projectile une grande vitesse, sans aucun danger pour les parois de l’arme. Cet artifice, qui donne les moyens de graduer, d’accroître peu à peu la force explosive des gaz, qui détruirait ainsi l’action brisante du fulmi-coton, nous paraît bon en principe, et il est fâcheux que l’idée du baron Séguier n’ait