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Le rendement à la poudrerie du Bouchet était, avons-nous dit, de 170 parties de pyroxyle pour 100 parties de coton sec. Le rendement de la fabrique autrichienne est un peu moindre ; il n’est que de 155 parties de pyroxyle pour 100 parties de coton.

En Angleterre, l’étude du coton-poudre a été reprise récemment. De grandes quantités de ce produit ont été préparées, en 1866 et 1867, à l’arsenal de Woolwich, et on paraît avoir réussi à perfectionner assez sa préparation pour obtenir un produit exempt des défauts que l’on a constatés dans les pyroxyles préparés en France et en Allemagne. Nous parlerons, à la fin du chapitre suivant, des propriétés du nouveau pyroxyle anglais.


CHAPITRE XI

propriétés balistiques du coton-poudre préparé en france. — ses effets dans les armes portatives et dans les bouches à feu. — dangers et inconvénients du coton-poudre. — le pyroxyle autrichien et le pyroxyle anglais. — résultats constatés en 1868. — conclusion.

Nous passons à l’examen des propriétés balistiques du coton-poudre.

Cette substance est éminemment et essentiellement combustible : une étincelle l’enflamme, le choc d’un lourd marteau suffit quelquefois pour la faire détoner. On s’explique aisément cet effet quand on connaît sa composition chimique. Le pyroxyle est une combinaison de la matière organique qui constitue le coton avec les éléments de l’acide azotique. D’après M. Béchamp, sa formule chimique est

M. Béchamp a trouvé aussi qu’il existe deux autres variétés de fulmi-coton ne contenant que 3 et que 4 équivalents d’acide azotique. Le coton et les matières végétales de la même espèce, sont des corps déjà très-combustibles par eux-mêmes ; en brûlant, ils donnent naissance à des produits gazéiformes, l’acide carbonique et la vapeur d’eau. Mais le coton ne renferme pas assez d’oxygène pour brûler complétement ; il reste toujours, après sa combustion, un résidu assez abondant de charbon. Dans le pyroxyle, au contraire, l’acide azotique combiné avec le coton, fournit à celui-ci tout l’oxygène nécessaire à sa combustion complète, et comme d’ailleurs l’acide azotique, lorsqu’il se décompose, donne lui-même naissance à des produits gazeux, il résulte de ces deux effets que le pyroxyle, en brûlant, se transforme totalement en fluides élastiques.

Ce composé réunit donc toutes les conditions nécessaires pour constituer une poudre explosive : une matière solide se réduisant instantanément en gaz. Nous donnerons une idée de la masse énorme de gaz qui se forme dans ce cas, en disant que, d’après les expériences directes, un volume de coton-poudre produit en brûlant huit mille volumes de gaz. Dans les mêmes circonstances, la poudre ordinaire produit seulement, comme l’a reconnu le capitaine Brianchon, quatre mille volumes de fluides élastiques. On comprend, d’après cela, la possibilité de consacrer le pyroxyle aux usages de la poudre.

Disons tout de suite que le pyroxyle est doué d’une force balistique plus considérable que celle de la poudre ordinaire, et que pour la charge des fusils de chasse, par exemple, au lieu de prendre 3gr,20 de poudre, qui représentent une charge ordinaire, il faut seulement prendre le quart de ce poids de fulmi-coton, c’est-à-dire 8 décigrammes. Dans un fusil de munition, 2 grammes de fulmi-coton produisent sur une balle pesant 25 grammes, le même effet que 9 grammes de poudre. Cependant, lorsque les charges augmentent dans des armes plus volumineuses, le fulmi-coton perd de sa supériorité de force impulsive sur la poudre.