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Chez tous les peuples qui en ont fait usage, la poudre a été constamment formée d’à peu près trois quarts en poids de salpêtre, d’un demi-quart en poids de charbon, et d’un demi-quart en poids de soufre. Le salpêtre contient en quantité suffisante, l’oxygène, l’élément destiné à brûler le soufre et le charbon, et à les transformer en gaz acide sulfureux et acide carbonique. En se décomposant sous l’influence de la chaleur, le salpêtre cède son oxygène au charbon et au soufre, et change ces corps simples en gaz acides sulfureux et carbonique. L’azotate de potasse ainsi décomposé, laisse comme résidu, l’azote, qui s’ajoute au mélange gazeux résultant de la combustion, et forme presque la moitié de la totalité de ce mélange gazeux.

Outre ces produits gazeux, il se forme des produits solides : tels sont le sulfure de potassium et le sulfure de potasse, ce dernier sel provenant de la combinaison du soufre avec les produits de la décomposition du salpêtre. Mais ces corps se trouvant dans un milieu à température très-élevée, se volatilisent, par l’action de cette chaleur excessive, et s’ajoutent, à l’état de vapeurs, au mélange gazeux. Une partie des produits solides sublimés se dépose le long des parois de l’arme, qui sont relativement froides. Il s’en dépose d’autant plus que la température produite dans l’arme, par la combustion de la poudre, est moins élevée, et que la force de projection qui arracherait ces particules des parois, est moins énergique.

Les effets explosifs de la poudre tiennent donc à ce que cette substance a la propriété de se transformer rapidement en une masse considérable de gaz. C’est une matière solide qui, en un instant, se change en gaz, dont le volume surpasse cinq à six cents fois le volume de la substance solide employée. On peut comparer son effet sur le projectile, à l’action d’un ressort d’acier, d’une puissance considérable, qui serait placé derrière le projectile, et qui, se détendant tout d’un coup, produirait son effet dans un espace de temps excessivement court.

Pour conserver cette comparaison, disons que, étant donnés dans l’intérieur d’une arme quelconque, le ressort tendu, et devant ce ressort le projectile, si l’on veut obtenir le plus grand effet balistique, il ne faudra pas détendre subitement le ressort, de telle façon que le projectile ne subisse qu’un choc brusque et soit ensuite abandonné par le ressort après ce choc. Il vaudra mieux évidemment faire agir le ressort, progressivement, et pendant tout le temps que le projectile parcourt l’intérieur de l’arme. Le maximum de force sera communiqué au projectile, à la condition que le ressort, touchant toujours ce projectile jusqu’à sa sortie de l’arme, ait à ce moment, c’est-à-dire quand il est parvenu à l’extrémité du canon, épuisé toute sa puissance. Il conviendra donc que la charge de poudre brûle tout entière avant que le projectile soit sorti de l’arme à feu.

La comparaison de l’effet explosif de la poudre à l’action d’un ressort est très-juste et très-commode ; mais il ne faut abuser de rien, ni des comparaisons, ni des ressorts, si l’on veut rester dans la logique et dans la pratique. Laissant donc de côté tout parallèle, nous dirons, en revenant à notre véritable objet, qu’il résulte des considérations qui précèdent, que l’on doit calculer la longueur des armes, ainsi que la force et la quantité de poudre, de manière que la charge tout entière de poudre ait brûlé avant que le projectile soit sorti de l’arme.

Si nous supposons la vitesse moyenne du projectile dans l’arme, de trois cents mètres par seconde, et la longueur du canon d’un mètre, il faudra que la charge de poudre, pour produire son maximum d’effet, brûle en un peu moins de de seconde. Il est facile de comprendre que si la poudre brûle plus lentement, une portion des grains non brûlés sera lancée, comme un projectile,