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Fig. 132. — Navire couvert portant le feu grégeois (d’après un manuscrit latin du xiiie siècle).


de bien des manières, pendant les batailles navales. On préparait des brûlots remplis de matières enflammées, qui, poussés par un vent favorable, allaient consumer les vaisseaux ennemis. On disposait aussi sur la proue des navires, de grands tubes de cuivre ou d’airain, à l’aide desquels on lançait le feu grégeois dans l’intérieur des vaisseaux ennemis. En outre, les soldats embarqués à bord des navires, étaient armés de tubes à main, qui servaient au même usage. Quelquefois on renfermait le mélange dans des fioles de verre ou dans des pots de terre vernissée, que l’on jetait contre l’ennemi, après en avoir allumé la mèche. C’est ce que montrent clairement les textes originaux sur lesquels M. Lalanne a appelé l’attention dans son mémoire sur le feu grégeois. Voici quelques passages de ces textes curieux.

L’empereur Léon le Philosophe, qui écrivit vers l’an 900, son livre des Institutions militaires, donne en ces termes des détails précis sur l’emploi du feu grégeois dans les combats maritimes :

« Nous tenons, tant des anciens que des modernes, divers expédients pour détruire les vaisseaux ennemis ou nuire aux équipages. Tels sont ces feux préparés dans des tubes, d’où ils partent avec un bruit de tonnerre et une fumée enflammée qui va brûler les vaisseaux sur lesquels on les envoie…

« … Vous mettrez sur le devant de la proue un tube couvert d’airain pour lancer des feux sur les ennemis ; au-dessus vous ferez une petite plateforme de charpente entourée d’un parapet et de madriers. On y placera des soldats pour combattre de là et lancer des traits.

« On élève dans les grandes dromones[1] des châteaux de bois sur le milieu du pont. Les soldats qu’on y met jettent dans les vaisseaux ennemis de grosses pierres, ou des masses de fer pointues, par la chute desquelles ils brisent le navire ou écrasent ceux qui se trouvent dessous, ou bien ils jettent des feux pour les brûler.

« — Il faut préparer surtout des vases pleins de matières enflammées, qui, en se brisant par leur chute, doivent mettre le feu au vaisseau. On se servira aussi de petits tubes à main, que les soldats portent derrière les boucliers et que nous faisons fabriquer nous-mêmes : ils renferment un feu préparé qu’on lance au visage des ennemis… On jette aussi avec un mangonneau de la poix liquide et brûlante, ou quelque autre matière préparée.

« … Il y a plusieurs autres moyens qui ont été

  1. Navires de course.