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Nous n’avons parlé jusqu’ici que des moyens que les navires auront désormais de correspondre entre eux. Mais le Code commercial assure aussi leur communication avec les côtes, par l’intermédiaire des sémaphores. Depuis le 1er mai 1866, tous nos sémaphores sont en mesure d’entrer en correspondance avec les navires qui passent au large, au moyen des signaux de grande distance du Code commercial, composés comme à l’ordinaire, ou bien représentés par les différentes positions des ailes des sémaphores. Ces derniers vont ainsi étendre les réseaux de nos télégraphes jusque dans l’Océan. Toutes les stations de nos rivages étaient déjà transformées en véritables bureaux télégraphiques ; elles vont devenir aussi des bureaux de poste. Depuis le 15 mai 1866, les guetteurs expédient par le télégraphe électrique, ou par la poste, toutes les communications qu’ils reçoivent des bâtiments en mer. La surtaxe de transmission maritime est fixée à 2 francs pour une dépêche télégraphique ou postale de vingt groupes. Les guetteurs signaleront de même, aux navires, les ordres, avis ou dépêches des armateurs. Les dépêches maritimes pourront être formulées en groupes de deux, trois ou quatre lettres, qui représenteront, à volonté, un sens secret convenu entre l’expéditeur et le destinataire, ou une des phrases du Code commercial.

Tout le monde comprend l’importance de ces mesures. On n’aura plus besoin, à l’avenir, d’attendre l’arrivée des paquebots pour connaître les nouvelles qu’ils apportent. L’armateur, averti de la présence de son navire en vue de la côte, pourra lui envoyer l’ordre d’aller déposer son chargement dans tel port où il aura trouvé un placement avantageux de ses marchandises. Le même moyen servira à éviter des retards, à économiser des frais inutiles, quelquefois à prévenir une catastrophe commerciale.

Ce n’est pas tout encore : les sémaphores, grâce au code commercial, rempliront une autre mission, tout aussi importante que celle pour laquelle ils ont été primitivement créés. Ils serviront à faire connaître aux navires les possibilités de mauvais temps, les tempêtes qui s’approchent, enfin toutes les pressions météorologiques intéressant la navigation.

Les signaux météorologiques d’avertissement sont exécutés au moyen de cônes et de cylindres en toile. Un cône dont la pointe est tournée vers le ciel, indique un coup de vent probable, venant du nord ; si la pointe est tournée vers la terre, on doit craindre un coup de vent du sud. Ces avertissements mettront les navires à même de prendre toutes les précautions nécessaires. Enfin, un pavillon noir sert à avertir d’un sinistre la côte et le large, et à appeler du secours.

Tant de précautions rassemblées finiront certainement par diminuer le nombre des sinistres de mer.

Bientôt, sans doute, l’expérience et la pratique auront consacré les dispositions du nouveau Code commercial anglo-français, et nous le verrons adopté par toutes les nations maritimes. L’initiative de la France n’aura pas été stérile en cette circonstance. S’il est impossible de supprimer les barrières de nationalités ou de frontières qui séparent les peuples modernes, au moins l’unité de langage régnera-t-elle sur la vaste étendue des mers ; et l’on verra cette langue universelle, dont le rêve a été caressé par tant de philosophes, réalisée, sinon sur la terre, au moins sur le domaine des eaux. Ainsi, l’on verra cesser la confusion des langues qui régnait sur mer ; la tour de Babel maritime aura fini son temps.

fin du télégraphe aérien.