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à 2 heures et demie, on atteignit la plus grande hauteur, 4 milles et demi (7 250 mètres). Quelque temps avant d’atteindre le quatrième mille, M. Glaisher perdit toute trace du spectre en observant la région nord du ciel ; le soleil n’était pas visible à cause de la position du ballon. Il conçut alors des inquiétudes, croyant d’abord qu’il y avait quelque chose de dérangé dans le spectroscope. Mais tout était en bon état. Il était évident que la lumière diffuse du ciel sans nuage est trop faible pour donner un spectre, excepté dans le voisinage du soleil. Quand le tournoiement du ballon permettait d’approcher le tube de l’astre radieux, le spectre reparaissait ; enfin, un rayon direct de lumière solaire frappa la fente du spectroscope, et M. Glaisher vit immédiatement le spectre dans tout son éclat, depuis la raie A jusqu’au delà de H. Il distinguait d’innombrables raies noires, beaucoup plus que lorsqu’il se trouvait au niveau du sol ; tandis qu’on aurait dû s’attendre à voir s’effacer peu à peu un certain nombre de raies telluriques, dues à l’absorption de l’atmosphère terrestre.

M. Glaisher tire, de ce fait, la conclusion, prématurée, selon nous, qu’il n’y a pas de raies telluriques ; il aurait fallu, pour décider cette question, faire quelques observations.

La descente de l’aérostat fut très-périlleuse. M. Coxwell, qui dirigeait ses regards vers la terre, s’aperçut tout à coup, qu’on s’approchait de la côte de la Manche. Pour ne pas tomber à la mer, il résolut de redescendre à toute vitesse. On donna donc issue au gaz, et le ballon s’abattit avec une effrayante rapidité. Heureusement la nacelle était construite en forme de parachute, et l’on put ralentir la vitesse en jetant du lest. Néanmoins les trois derniers kilomètres furent franchis en quatre minutes seulement, et le choc fut si violent que la plupart des instruments furent brisés. On ne conserva que quelques ballons d’air recueilli dans les plus hautes régions. C’est à 2 heures 50 minutes que nos aéronautes touchaient terre, près de la station de Newhaven.

Un résultat important des dernières ascensions scientifiques de M. Glaisher, c’est la détermination de la loi de décroissance des températures selon la hauteur. Les résultats que nous avons rapportés plus haut (page 611) laissaient indécis le véritable chiffre de cette décroissance. Dans ces dernières observations M. Glaisher obtint des chiffres plus positifs. Selon lui, quand le ciel est serein, la température s’abaisse d’abord de 1 degré centigrade par 55 mètres ; mais vers 9 ou 10 kilomètres d’élévation, la décroissance se ralentit considérablement ; elle n’est que de 1 degré pour 550 mètres.

Ainsi, ce rapport varie beaucoup, et l’on a eu tort de le supposer constant (on avait admis jusqu’à un abaissement régulier d’un degré par 165 mètres).

Dans son ascension du 31 mars 1863, M. Glaisher trouva la température de l’air à 18 degrés au-dessous de zéro, vers 7 250 mètres d’altitude. Quel froid énorme doit régner, d’après cela, dans les régions planétaires !

Dans une ascension faite au mois de juillet suivant, M. Glaisher entra dans un nuage, à 600 mètres d’élévation. Il entendit à 3 kilomètres, une sorte de gémissement qui venait des régions inférieures et semblait annoncer un orage. À 3 kilomètres et demi, il rencontra une petite pluie. Il entra ensuite de nouveau dans les nuages. La température oscillait autour du point zéro ; à 5 200 mètres, elle était montée à 2 degrés ; vers 5 600 mètres, elle était tombée à 5 degrés. Vers 6 800 mètres, elle atteignit son minimum : 8 degrés au-dessous de zéro. Le ciel, à cette hauteur, était couvert de cirrhus, et il était d’un bleu pâle dans les éclaircies. On planait au-dessus des nuages, mais tout alentour on ne voyait qu’une immense mer de