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par suite du courant de surface, que de deux nœuds et demi.

À sept heures du soir, on se trouvait à 11 kilomètres du rivage, et l’eau était tellement basse, qu’on jugea prudent de se mettre à l’ancre pour la nuit. On avait filé depuis Bushire, 547 kilomètres de câble.

Le 28, au matin, ceux qui ne connaissaient pas ces parages furent surpris de n’apercevoir aucune terre, La mer était extrêmement basse, et les eaux fangeuses des deux grands fleuves couraient avec une étonnante rapidité, ce qui prouvait que l’on approchait du rivage. On n’apercevait pourtant, dans un rayon de 80 kilomètres, aucune trace de terre. Sir Charles Bright fut convaincu, au premier coup d’œil, que l’atterrissement d’un câble dans une eau si fangeuse et si rapide, offrait de graves difficultés.

Fig. 132. — Charles Bright, ingénieur du télégraphe anglo-indien.

Aucun bâtiment de l’escadre ne pouvait approcher à plus de deux lieues du rivage. Les chaloupes mêmes, tout en profitant de la marée haute, ne pouvaient s’approcher à plus de 3 kilomètres. Il fallait, en outre, pour atteindre la station flottante du fleuve, traîner le câble à une distance de 6 400 mètres, sur un banc fangeux et sans consistance, que la haute marée venait recouvrir.

Dans ces conjonctures difficiles, sir Charles Bright prit le parti suivant. Il fit couper en fragments de 1 600 mètres de longueur, la quantité de câble nécessaire pour traverser le banc de vase, et il fit embarquer ces fragments à bord du bateau plat la Comète. Puis on réunit cinq-cents Arabes, que l’on chargea de traîner ces fragments de câble à travers la vase, et de les disposer bout à bout. Les extrémités de ces tronçons furent ensuite soudées deux à deux, et la communication fut complétée entre la station flottante de Fao et le rivage à Khor-Abdallah.

Il ne restait plus qu’à fixer à terre l’extrémité du câble pour achever la ligne jusqu’à Bassorah (Turquie d’Asie), et établir ainsi la liaison télégraphique de l’Asie Mineure et de la Turquie.

Bien qu’il y eût à peine une distance de quelques lieues à faire le long du Tigre, cet atterrissement était un travail d’une difficulté extraordinaire, à cause du manque d’eau dans le fleuve, de la profondeur de la vase et de sa faible consistance.

Le 4 avril, l’Amber Witch ayant pris à son bord une certaine quantité de câble, navigua aussi près du bord que son tirant d’eau le lui permettait, c’est-à-dire à deux lieues environ. Deux lieues de câble furent alors distribuées entre dix des plus grandes chaloupes qui appartinssent à la flotte, et le 5 avril au matin, ce long cortège flottant s’éloigna de l’Amber Witch, du côté du rivage.

Mais quand on eut filé 6 400 mètres de câble et que les chaloupes furent à environ 1 600 mètres du banc de vase auquel on donne le nom de rivage, les chaloupes échouèrent. Il y avait très-peu d’eau, mais on rencontrait toujours au fond, la vase.

Il n’y avait pas à hésiter ; il fallait à tout prix fixer le câble à un point quelconque. Sir