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position de la substance, imprégnant ce papier. Cette substance, c’est l’azotate de manganèse : le courant électrique décompose ce sel, et laisse à nu de l’oxyde de manganèse, qui forme sur le papier, des traits bruns, fortement accusés.

Mais le papier chimique est l’élément accessoire de l’appareil qui va nous occuper. C’est le principe du télégraphe typographique qui fait l’intérêt et l’originalité de cette invention, et ce principe, le voici :

Imaginons un fil télégraphique qui se termine, à chacune des deux stations, par une pointe de platine. Sous la pointe qui représente le pôle positif de la pile, faisons passer un ruban de papier, imbibé d’une solution d’azotate de manganèse et appliqué sur une règle de fer argenté, communiquant avec le sol ; pendant que sous l’autre pointe, qui correspond au pôle négatif, défile une dépêche, préalablement composée en caractères typographiques, également en communication avec le sol. Tant que cette pointe rencontre le relief d’un caractère d’imprimerie, le courant passe, et à la station d’arrivée, le nitrate de manganèse, réduit par le courant, forme sur le papier une tache de couleur brune. Lorsque la pointe qui fonctionne à la station de départ, se trouve sur un creux du caractère typographique, le courant est interrompu, et la partie du papier qui défile sous l’autre pointe, conserve sa blancheur.

Mais il est évident que cette succession de taches brunes et d’intervalles blancs, ne suffirait pas pour reproduire la forme des caractères. M. Bonelli a reconnu que, pour reproduire cette forme, il faut mettre en jeu, à chaque station, trois pointes, isolées l’une de l’autre, et en communication avec trois fils conducteurs d’une pile voltaïque. Les trois pointes réunies forment les dents d’une sorte de petit peigne, que l’on place perpendiculairement au centre de la ligne des caractères.

Si, au lieu de faire passer sous ce peigne une composition typographique, on l’appuyait sur une plaque métallique unie, le peigne à la station d’arrivée tracerait sur le papier chimique trois lignes parallèles, comme celles qui servent à écrire la musique, mais très-serrées. Maintenant, si le peigne appuie sur un caractère typographique, les dents qui rencontreront le relief détermineront, à la station opposée, autant de petites taches brunes sur le papier mobile, tandis que l’espace qui correspond au creux de la lettre sera blanc, parce que, à la station de départ, les dents qui se trouvent au-dessus du creux sont hors de communication avec le métal des types. Supposons, par exemple, que la lettre D vienne à défiler sous le peigne, ce peigne glissera d’abord sur la barre verticale du D, et à l’autre station les cinq dents marqueront cinq petits traits parallèles sur le papier ; au moment suivant, la première et la cinquième dent seules toucheront les lignes horizontales supérieure et inférieure du D, et à la station d’arrivée, le papier, qui s’est déjà déplacé d’une quantité égale, recevra les marques rectilignes des deux dents extrêmes pendant quelques instants ; enfin les pointes extrêmes quitteront le relief de la lettre D, et les trois dents du milieu viendront s’y poser de nouveau, ce qui déterminera, à l’autre bout de la ligne, l’impression de trois taches très-rapprochées qui formeront la figure du D. Les lettres ainsi imprimées et dont la figure 70 donne un spécimen, sont presque aussi faciles à lire qu’une impression ordinaire.

Fig. 70. — Conducteur du télégraphe typographique de M. Bonelli.

Tel est le principe du télégraphe typographique. Disons maintenant comment ce principe est mis en œuvre.