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rent point de ceux que nous avons précédemment décrits, nous nous contenterons de rapporter, sous forme de conclusions, les résultats obtenus, et qui peuvent se formuler comme il suit :

1o Les contractions musculaires que l’on provoque, avec la pile de Volta, sur le corps des individus récemment décapités, sont semblables à celles qui se produisent pendant la vie.

2o La pile de Volta agit d’une manière beaucoup plus prononcée sur les muscles soumis à l’empire de la volonté que sur ceux qui sont soustraits à cette influence. Les contractions les plus fortes furent produites dans les muscles de la face, de la poitrine, des membres et dans le diaphragme ; c’est là ce qui explique le peu de sensibilité à l’influence électrique de la tunique musculaire des intestins et des parois du cœur.

3o La pile de Volta exerce une action d’autant plus marquée que l’on applique les conducteurs plus exactement suivant la direction des nerfs.

4o L’électricité statique produit, mais à un plus faible degré, les mêmes effets que l’électricité dynamique.

Les expériences faites par les médecins de Mayence, sur les criminels décapités, furent ensuite répétées identiquement sur des animaux à sang chaud, et donnèrent les mêmes résultats[1].

Au tableau qui précède nous ajouterons un dernier trait, qui peint bien l’époque où furent accomplies ces étranges recherches.

On avait beaucoup agité en France, peu de temps auparavant, à l’instigation et d’après les assertions expérimentales de Sue, la question de savoir si des individus décapités souffrent quelques minutes après la décollation, et si les organes des sens qui résident dans la tête, sont encore accessibles, pendant quelque temps, aux impressions externes.

Pour décider si le sentiment du moi persiste quelque temps après la décapitation, deux jeunes médecins, de l’association de Mayence, s’étaient placés sous l’échafaud, et recevaient successivement les têtes, à mesure qu’elles tombaient sous le couteau fatal. L’un prit entre ses mains la première tête, et tous deux, l’ayant considérée attentivement pendant quelques instants, ils n’y aperçurent aucun mouvement, aucune contraction sensible. Les yeux étaient à demi fermés. Alors, l’un des expérimentateurs cria, tantôt dans l’une, tantôt dans l’autre des deux oreilles, ces mots : M’entends-tu ? pendant que son compagnon, qui tenait la tête, observait attentivement l’effet que ces cris auraient pu produire. Mais aucun mouvement ne fut observé dans toute l’étendue de la face.

Une seconde tête fut soumise à la même épreuve. Seulement les expérimentateurs changèrent de rôle : celui qui avait tenu la tête, dans l’essai précédent, fut chargé de crier, l’autre, au contraire, d’observer. Mais il ne se manifesta pas plus de sensibilité dans ce cas que dans le précédent.

Cinq têtes subirent successivement cette triste épreuve. Les résultats furent constamment les mêmes : les yeux de toutes les têtes abattues ne firent jamais le moindre mouvement. Ils demeurèrent fixes, immobiles et ouverts.

Ainsi le sentiment des impressions externes ne persiste pas un seul instant après la décapitation.

Détournons les yeux de cet affreux tableau dont aucun désir de curiosité philosophique ou scientifique ne peut voiler l’horreur !

C’est dans les années 1803 et 1804 que s’étaient accomplies les étranges expériences que nous venons de rappeler. Pour terminer ce sujet, nous rapporterons une dernière observation du même genre, qui eut lieu en Angleterre, plusieurs années après, et dans laquelle les effets qui nous occupent prirent une effroyable énergie.

Il s’agit des expériences galvaniques qui furent faites le 4 novembre 1818, à Glasgow, sur le corps de l’assassin Clydsdale, par le docteur Andrew Ure et quelques autres physiologistes anglais, qui avaient acheté du criminel con-

  1. Ces diverses observations sont rapportées dans une dissertation allemande : Expériences galvaniques et électriques faites sur des hommes et des animaux, par une société de médecins établis à Mayence, département du Bas-Rhin (Galvanische und elektrische Versuche an Menschen- und Thierkörpern, etc., in-4o, Frankfurt am Mein, 1804).