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tème du galvanisme l’emportèrent sur toutes mes répugnances, et je passai aux expériences suivantes[1]. »

Aldini décrit ensuite les résultats qu’il obtint avec le secours des médecins et des physiologistes qui l’assistèrent dans ses observations.

Mais de toutes les expériences faites par Jean Aldini, celle qui fit le plus de bruit eut lieu à Londres, le 17 janvier 1803, pendant le voyage qu’il avait entrepris pour faire connaître ces curieux phénomènes.

Forster, pendu comme meurtrier, fut le sujet de cette expérience. Il était âgé de vingt-six ans et d’une constitution robuste. Après l’exécution, son corps fut exposé pendant une heure sur la place de Newgate par un temps très-froid. Le cadavre fut remis à M. Koate, président du Collége des chirurgiens de Londres, qui procéda, de concert avec Aldini, aux essais de galvanisation du cadavre au moyen d’une pile à colonne de cent vingt couples, zinc et cuivre.

Deux fils métalliques conducteurs communiquant avec les deux pôles opposés de la pile, ayant été appliqués, l’un à la bouche et l’autre à une oreille du cadavre, préalablement humectées d’une dissolution de sel marin, les joues et les muscles de la face se contractèrent horriblement, et l’œil gauche s’ouvrit de toute sa grandeur. On observa, en graduant l’intensité de l’agent électrique, que la violence des contractions musculaires était en proportion du nombre des couples métalliques mis en action.

Les arcs conducteurs de la pile étant mis en contact avec les deux oreilles, tous les muscles de la tête furent agités de frémissements. L’action convulsive se propageant à la face, les traits du cadavre furent en proie à des contractions désordonnées ; les paupières ne cessaient de clignoter et les coins de la bouche d’être tiraillés hideusement.

En appliquant les conducteurs de la pile à une des oreilles et au rectum, les muscles du tronc, même les plus éloignés des points de contact des deux conducteurs, furent agités de mouvements si vifs, que le cadavre semblait reprendre la vie.

L’intensité des contractions organiques fut encore exaltée, lorsque Aldini vint à associer des stimulants chimiques à l’action du galvanisme. En versant de l’ammoniaque dans les narines et dans la bouche du cadavre, tandis que le courant électrique traversait les muscles de la face, les convulsions se propageaient jusqu’aux muscles de la tête et du cou, et même jusqu’au deltoïde, c’est-à-dire à l’extrémité supérieure du bras. Les contractions étaient si violentes, si analogues aux mouvements naturels, « qu’il semblait, dit Aldini, que, par impossible, la vie allait être rétablie ».

Aldini conclut de ces expériences, que le galvanisme pourrait peut-être agir efficacement pour rappeler à la vie les asphyxiés et les noyés, c’est-à-dire les individus chez lesquels la vie n’est pas encore absolument éteinte, et ce moyen a été depuis assez souvent mis en pratique.

Des expériences semblables furent faites à Londres par Aldini, dans l’amphithéâtre de l’hôpital de Guy et Saint-Thomas, en agissant sur des animaux décapités.

C’est dans l’Essai théorique et expérimental sur le galvanisme, publié à Paris en 1804, et dédié au premier consul Bonaparte, qu’il faut chercher les détails des étonnants résultats obtenus par l’expérimentateur italien, en faisant agir le galvanisme sur les animaux récemment tués[2]. On peut voir dans ce curieux ouvrage, comment, avec une pile à colonne composée d’une centaine de couples, tous les mouvements de la vie furent repro-

  1. Essai théorique et expérimental sur le galvanisme, p. 69.
  2. Essai théorique et expérimental sur le galvanisme, avec une série d’expériences faites en présence des commissaires de l’Institut national de France et en divers amphithéâtres anatomiques de Londres, par Jean Aldini, professeur de l’Université de Bologne. 1 vol. in-4o, avec planches. Paris, an XII (1804).