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cité métallique ce que Galvani avait désigné dans ses mémoires sous le nom d’électricité animale.

Quand on se trouvait disposé à admettre, sans autre examen, cet étrange principe, que le simple contact de deux métaux différents est une cause de production d’électricité, l’explication des phénomènes découverts par Galvani devenait chose simple. Lorsque l’arc métallique qui unissait les muscles lombaires aux nerfs cruraux, était formé de deux métaux, ces deux métaux, selon Volta, dégageant de l’électricité par leur simple contact, le fluide électrique, ainsi développé, passait dans les organes de la grenouille, et y provoquait ces contractions tétaniques qu’il a le privilége d’y exciter. Si, au contraire, l’arc excitateur était formé d’un seul métal, c’était alors la différence des humeurs imbibant les muscles et les nerfs, qui engendrait cette même force électro-motrice.

Ainsi, Volta prenait le contre-pied de la théorie de Galvani. Pour l’anatomiste de Bologne, la source de l’électricité, c’était le muscle ; l’arc métallique provoquant les contractions ne remplissait d’autre rôle que celui de conducteur, et la cause réelle et directe des mouvements convulsifs de l’animal, c’était le courant électrique qui s’élançait du muscle au nerf et du nerf au muscle, à travers l’arc métallique. Pour le physicien de Pavie, au contraire, la cause productrice de l’électricité résidait dans le contact des parties hétérogènes, et la contraction musculaire provenait de l’irritation des nerfs par le passage du courant électrique engendré par ce contact.

Galvani défendit pendant six années, sa théorie de l’électricité animale contre les objections incessantes de son adversaire. La mémorable lutte scientifique qui s’établit entre ces deux grands esprits, vivra à jamais dans l’histoire de la science, tant pour l’importance des questions discutées, que pour la convenance et la dignité des formes qui furent observées par les deux adversaires pendant cette longue controverse.

Les réponses de Galvani aux objections de Volta sont contenues dans une Lettre à Carminati, qui parut en 1792 ; dans un mémoire anonyme de Galvani, d’une très-grande importance, publié en 1794, sur l’usage et l’activité de l’arc conducteur dans les contractions musculaires ; enfin, dans cinq mémoires adressés par lui, en 1797, à l’illustre Spallanzani. Ses neveux, les deux Aldini, prirent aussi une certaine part à cette mémorable polémique.

Comme on vient de le voir, Volta plaçait la source de l’électricité dans le contact des substances hétérogènes ; Galvani mit tous ses efforts à prouver que cette hétérogénéité n’était nullement nécessaire pour provoquer les contractions. Les expériences par lesquelles Galvani chercha à établir cette vérité furent nombreuses et sans réplique. Ce sont encore les preuves les plus frappantes que l’on puisse invoquer aujourd’hui pour démontrer l’existence de l’électricité animale.

Galvani fit d’abord remarquer que, si l’hétérogénéité de l’arc ajoute, il est vrai, à l’intensité de la contraction organique, cette condition est loin d’être indispensable, car on obtient ces mêmes mouvements avec un arc composé d’un seul métal, tel qu’une lame d’or parfaitement pur et homogène. Il prouva ensuite qu’on peut se passer complétement de métaux pour composer un arc excitateur. Il démontra ce fait décisif en exécutant le premier la curieuse expérience qui a été depuis si souvent répétée dans les cours de physique médicale et qui consiste à produire des contractions musculaires chez les grenouilles sans l’emploi d’aucun métal.

On place une grenouille de manière que ses pattes et ses nerfs plongent séparément dans deux capsules de verre (matière isolante) remplies d’eau. On complète le circuit avec une carte à jouer mouillée, avec un morceau de peau ou de substance musculaire fraîche, en un mot, avec un con-