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temps d’orage, et lorsque le ciel était serein, soit avec des barres de fer isolées, soit avec des cerfs-volants. En variant ces expériences de différentes manières, il fit plusieurs observations intéressantes. Les cordes de ses cerfs-volants étaient quelquefois garnies, et d’autres fois dépourvues, de fil de fer. Afin que ces cerfs-volants fussent constamment isolés, lorsqu’il leur donnait plus ou moins de corde, il roulait la corde, comme l’avait fait Romas, sur un dévidoir supporté par des pieds de verre[1].

Musschenbroek, en Hollande, étudia aussi l’électricité aérienne, au moyen du cerf-volant. Il observa que les étincelles électriques étaient très-faibles, lorsque l’appareil était près de la terre, et d’autant plus fortes que l’appareil était plus élevé dans les airs.

Le 16 septembre 1756, Musschenbroek se trouvant à Warmond, village près de Leyde, attacha aux deux extrémités d’un fil de fer de cent cinquante pieds de longueur, deux rubans de soie ; et il disposa ce fil à la hauteur de quatre pieds et demi, parallèlement à l’horizon. Il ne découvrit ainsi aucun signe d’électricité. Il plaça ensuite le même fil de fer, toujours isolé par ses deux rubans, verticalement, le long d’une tour. Ce conducteur métallique ne donna encore aucun signe d’électricité. On en obtint, au contraire, par le moyen d’un cerf-volant qui fut porté très-haut dans l’air ; ce qui prouvait qu’il existait du fluide électrique libre dans les régions élevées de l’air, tandis que la partie de l’atmosphère située plus près du sol, n’en renfermait point.

Quand le cerf-volant fut à sept cents pieds de hauteur environ, on tira d’une clef qu’on avait attachée à l’extrémité inférieure du fil de fer qui le retenait, des étincelles très-fortes, qui excitaient une commotion dans toute la longueur du bras. En approchant la main du fil de fer, on éprouvait comme la sensation d’une toile d’araignée.

Le 14 juillet 1757, Musschenbroek fit dans les faubourgs de Noordwick, avec le baron Van der Does, les mêmes observations. Le cerf-volant était attaché, non à une corde, mais à un fil de fer très-mince, qui se roulait, à l’aide d’une manivelle, sur un tambour de bois, de sorte qu’on pouvait l’allonger à volonté. L’extrémité inférieure de ce fil de fer était attachée à un ruban de soie. Ces savants se trouvaient sur le bord de la mer lorsqu’ils élevèrent leur cerf-volant ; le ciel était un peu nébuleux, et le vent d’est soufflait légèrement. Aucun signe d’électricité n’apparut tant que l’appareil fut peu éloigné de la terre. Quand il se fut élevé à cent pieds, on commença à apercevoir une faible électricité et à tirer de petites étincelles.

Nos expérimentateurs résolurent alors de se transporter au sommet des plus hautes montagnes sablonneuses de Noordwick. Arrivés là, ils lancèrent de nouveau le cerf-volant, qui se chargea d’une grande quantité de matière électrique ; de sorte qu’en très-peu de temps, on tira avec une clef, d’un tube de fer communiquant à la chaîne attachée au cordon de soie, que l’on tenait à la main, de très-fortes étincelles qui partaient avec bruit et qui répandaient autour d’elles une odeur sulfureuse[2].

« Le 20 juillet 1757, dit encore Musschenbroek, un violent orage s’étant élevé sur les sept heures du soir, je lançai en l’air un cerf-volant ; le fil de fer donna alors des explosions très-promptes et très-fortes ; quelquefois elles partirent avec l’éclair, mais elles cessaient lorsque le tonnerre grondait ; ces étincelles se succédaient avec une très-grande rapidité, et produisaient des éclats qui pouvaient être entendus de très-loin. Ayant approché de la tête d’un chien, d’un bouc, d’un jeune taureau le fil de fer, ces animaux furent frappés si violemment, qu’ils prirent aussitôt la fuite, et qu’ils ne voulurent jamais souffrir qu’on les exposât à la même tentative. Nous fîmes une chaîne, en nous donnant la main ;

  1. Lettere dell’ elettricismo, p. 112.
  2. Cours de physique expérimentale et mathématique, par Pierre Van Musschenbroek, traduit par Sigaud de Lafond, t. I, p. 396, § 913.