Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 1.djvu/517

Cette page a été validée par deux contributeurs.

émis, après Nollet, par divers autres physiciens, parmi lesquels nous citerons Winckler en Allemagne, et Hales en Angleterre.

Déjà, en 1726, l’Académie des sciences de Bordeaux avait décerné son prix annuel à un mémoire du révérend Père Lozeran du Fech, natif de Perpignan, sur la cause du tonnerre et des éclairs. Dans ce mémoire, la cause du tonnerre était rapportée à l’embrasement des exhalaisons terrestres, selon la doctrine alors en vogue. Mais les phénomènes électriques qui furent signalés sur ces entrefaites, déterminèrent, en 1749, l’Académie de Bordeaux à remettre la même question au concours.

Le prix fut accordé en 1750, à un médecin de Dijon, nommé Barberet, qui admettait l’analogie de la foudre avec l’électricité, sans invoquer toutefois aucune expérience, et qui ne traitait la matière que par de simples considérations générales, dans le goût des dissertations académiques de cette époque.

Cette décision de l’Académie de Bordeaux couronnant de ses palmes la doctrine de l’analogie de la foudre avec l’électricité, montre bien, selon nous, à quel point cette opinion était alors dans le courant des idées générales. Les Académies ne sont pas novatrices. L’histoire et les exemples contemporains, montrent suffisamment qu’elles représentent, dans les sciences, l’esprit du passé et le maintien rigoureux des opinions reçues. S’attachant surtout à conserver le dogme scientifique le plus généralement accepté, elles ne peuvent représenter l’idée de l’avenir, ni celle du progrès. Or, puisque en France, une Académie prenait sous son patronage l’idée de l’origine électrique du tonnerre, on peut en conclure que c’était là une doctrine en parfaite harmonie avec les opinions scientifiques du temps.

La distinction accordée par l’Académie de Bordeaux au mémoire de Barberet, de Dijon, dans lequel on posait nettement le principe de l’analogie de la foudre avec l’électricité, imprima une impulsion nouvelle aux recherches déjà entreprises sur ce sujet. Parmi les physiciens qui embrassèrent cette idée avec le plus d’ardeur, il faut citer surtout de Romas, l’un des membres les plus actifs de l’Académie de Bordeaux.

Né dans la petite ville de Nérac, qui fut aussi le berceau des Montesquieu, appartenant à une famille noble de la province de Guyenne, de Romas n’était pas un savant de profession ; il était lieutenant assesseur au présidial de Nérac, c’est-à-dire simple juge au tribunal civil de cette ville. Il était entré dans la carrière de la magistrature. Une fois en possession de la place modeste d’assesseur au présidial de sa ville natale, il put se livrer à la vocation bien décidée qui le portait vers l’étude des sciences. Il possédait en physique des connaissances solides et variées. Si l’on consulte ses nombreux écrits, et en particulier ses recherches sur le magnétisme des corps, on voit qu’il avait abordé les parties les plus élevées et les plus difficiles de la physique de son temps. Comme s’il eût trouvé trop étroit pour ses facultés le champ de cette dernière science, il s’occupait encore de mécanique, de géographie, de navigation, d’agriculture, d’élève des bestiaux, et sur ces divers sujets, il a laissé en manuscrits ou imprimés, trois gros volumes de mémoires.

Peu de jours après la publication du travail de Barberet, de Dijon, c’est-à-dire au mois d’août 1750, Romas présenta à l’Académie de Bordeaux un mémoire qui avait pour objet de signaler les ressemblances physiques entre la foudre et l’électricité. Cet écrit fut composé à l’occasion d’un coup de tonnerre qui, le 30 juillet 1750, avait frappé le château de Tampouy, situé près de Nérac dans la sénéchaussée de Marsan, diocèse d’Aire. Il a pour titre : Observation qui prouve que la foudre a non-seulement deux barres de feu, de même que l’électricité a deux étincelles ; mais que, de même que l’électricité, elle a aussi deux attractions. Romas cherche à prouver dans cet écrit :