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quelques pratiques utiles sur l’art d’écarter la foudre, sans que, pour cela, les personnes en possession de ce moyen, aient pu se rendre compte de leur véritable action, sans qu’elles aient été dirigées par des principes scientifiques.



CHAPITRE II

faits naturels et observations qui ont pu conduire à la découverte de l’identité de la foudre et de l’électricité. — faits rapportés par les historiens latins. — observations consignées dans l’histoire moderne. — le chateau de duino, dans le frioul. — le feu saint-elme. — manifestations électriques en mer. — scintillations électriques dans les alpes. — découverte de l’analogie de la foudre et de l’électricité. — wall. — grey. — jean freke et benjamin martin. — l’abbé nollet. — question posée par l’académie de bordeaux. — mémoire de barberet, de dijon, sur la ressemblance du tonnerre et de l’électricité. — mémoire de romas, de nérac.

L’électricité se trouve répandue dans la nature avec une telle abondance, que ses effets ont pu se manifester spontanément aux yeux des hommes, dans une foule de circonstances diverses. À toutes les époques, on a constaté des apparitions, des scintillations lumineuses, des attractions et des mouvements, qui avaient l’électricité pour cause. Mais avant que la science fût en possession de données exactes sur ces phénomènes météoriques, c’est-à-dire avant la connaissance et l’étude de l’électricité, il était impossible de rattacher entre eux par un lien commun les faits de ce genre que l’observation révélait de loin en loin. Il fallait avoir des notions positives sur l’électricité, pour comprendre que beaucoup d’accidents extérieurs et de phénomènes naturels, dépendaient d’une cause de ce genre et obéissaient à la même loi.

C’est ce qui explique que, depuis l’antiquité jusqu’à la fin du dernier siècle, les physiciens aient pu, dans un grand nombre de cas, être témoins de manifestations extérieures du fluide électrique, sans soupçonner la nature ni pouvoir fournir l’explication de ces phénomènes.

Une revue des principales observations de ce genre que l’histoire nous a conservées, prouvera suffisamment que beaucoup de faits naturels, qui ont été remarqués à différentes époques, avaient pour cause une action électrique, et auraient pu mettre les savants sur la voie d’une grande découverte, c’est-à-dire dévoiler l’identité de la foudre et de l’électricité, ou du moins faire constater l’existence de l’électricité libre dans l’atmosphère.

Le cheval que montait, à Rhodes, l’empereur Tibère, étincelait sous la main qui le frottait fortement. On citait un autre cheval doué de cette propriété. Le père de Théodoric, et quelques autres, avaient observé ce même phénomène sur leur propre corps[1].

Mais les Romains avaient une manière commode d’éviter l’explication embarrassante d’un phénomène physique. On mit ces faits au rang des prodiges, ce qui dispensa de tout examen.

Pendant la nuit qui précéda la victoire que Posthumius remporta sur les Sabins, les javelots des soldats romains jetaient autant de clarté que des flambeaux. Lorsque Gylippus allait à Syracuse, on vit une flamme sur sa lance[2].

Suivant Procope, le ciel favorisa Bélisaire du même prodige pendant la guerre contre les Vandales[3].

On lit dans Tite-Live que Lucius Atreus ayant acheté un javelot pour son fils, qui venait d’être enrôlé parmi les soldats, cette arme parut embrasée, et jeta des flammes pendant plus de deux heures, sans être consumée par ce même feu[4].

  1. Damascius in Isidor. Vit. apud Phot. Biblioth. d. 242.
  2. « Gylippo Syracusas petenti, visa est stella super ipsam lanceam constitisse. In Romanorum castris visa sunt ardere pila, ignibus scilicet in illa delapsis : qui sæpe, fulminum more, animalia ferire solent et arbusta ; sed si minores vi mittuntur, defluunt tantum et insident, non feriunt nec vulnerant. » (Senec., Natur. Quæst., lib. I, cap. i.)
  3. Procop. De Bell. Vandal., lib. II, cap. ii.
  4. Tite-Live, liv. XLIII.