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Ce système était beaucoup trop compliqué pour se prêter à aucun usage pratique.


M. Andraud est encore l’inventeur du système éolique, qui offre tous les inconvénients du système des machines fixes, et de plus, les défauts qui lui sont propres.

Dans ce nouveau système, on supprime la locomotive, et l’on imprime le mouvement aux voitures, par l’effet de la compression et du refoulement de l’air dans un tuyau flexible, couché au milieu de la voie. Un tube de cuir, rendu imperméable par plusieurs enveloppes de caoutchouc, est disposé tout le long de la voie, entre les deux rails. Une voiture placée sur les rails, repose sur ce tube, à l’aide d’une large roue de bois dont elle est munie. Quand on vient, en ouvrant un robinet, à introduire de l’air comprimé dans le tube, celui-ci, subitement gonflé, pousse en avant la voiture en faisant office de coin, et la lance sur les rails.

Le réservoir d’air comprimé, qui consiste en un canal enfoui sous le sol, est établi sur le bord de la voie. Des machines à vapeur, disposées en nombre convenable, sur toute l’étendue de la ligne, servent à condenser l’air dans ce réservoir[1].

Dans le système éolique, on supprime, avons-nous dit, la locomotive ; on se met par conséquent à l’abri des inconvénients qu’entraîne le poids considérable de cet appareil moteur, et des dépenses qu’absorbe son entretien. On peut tourner sans difficulté les courbes du plus petit rayon ; les pentes ordinaires sont franchies sans obstacle, et si les rampes sont trop considérables, rien de plus simple que d’accroître la puissance motrice : il suffit d’augmenter les dimensions du tube propulseur.

Cette faculté de tourner dans les courbes et de remonter certaines pentes, simplifierait dans une proportion extraordinaire, le tracé des chemins. Ces énormes remblais, ces nivellements de terrain, ces viaducs, ces tunnels, qui sont une source de dépenses incalculables dans le tracé des chemins de fer ordinaires, disparaîtraient à la fois : la terre, telle à peu près que Dieu l’a faite, suffirait aux modestes nécessités de ce système.

Malheureusement, il n’a rien de pratique et ne pourrait s’appliquer à des lignes étendues. Tout au plus donnerait-il de bons résultats pour des chemins d’un petit parcours, ou pour les embranchements des grandes lignes. Nous avons vu fonctionner, en 1856, dans un terrain vague des Champs-Élysées, le système éolique de M. Andraud. C’était un joli joujou, mais ce n’était qu’un joujou.


Le système hydraulique, imaginé et essayé sur le chemin de fer de Dublin à Cork, par un ingénieur anglais, M. Shuttleworth, et sur lequel un constructeur français, M. Girard, a plus tard appelé l’attention, offre une grande analogie avec le système de M. Andraud. En effet, au lieu d’un tube rempli d’air comprimé, M. Girard emploie un tube plein d’eau. Dans les deux systèmes, le train ouvre et ferme successivement, en passant, des robinets, à l’aide desquels on injecte le fluide moteur dans un appareil de locomotion.

L’appareil de locomotion, dans le système Girard, consiste en deux turbines placées sous les wagons, et qui impriment aux roues le mouvement de rotation. La conduite d’eau, disposée entre les rails, sur tout le parcours de la voie, est alimentée par des réservoirs distribués le long de la voie, de distance en distance.

  1. En raison de la faible intensité de la force motrice qui réside dans l’air comprimé, le système éolique ne pourrait servir à traîner de lourds convois composés d’une série de wagons : une seule voiture pourrait chaque fois être mise en marche. Cette disposition ne serait pas à la rigueur un désavantage. Il y aurait peut-être, au contraire, une utilité marquée à établir sur les chemins de fer, au lieu de convois composés d’une douzaine de voitures partant trois ou quatre fois par jour, un transport régulier, formé d’une seule voiture, partant chaque cinq ou six minutes.