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La présence de cette roche avait été très-exactement prédite par MM. Élie de Beaumont et Sismonda qui avaient annoncé du granit à une distance de 1 500 à 2 000 mètres de la bouche du tunnel, du côté de l’Italie.


On vient de voir que les conditions particulières aux chemins de fer et les difficultés inhérentes à leur établissement, ont été une occasion constante de triomphe pour la science de l’ingénieur. La construction des ponts et viaducs, que nous avons maintenant à examiner, va nous prouver que l’architecture n’a pas moins gagné que les autres arts, à la création des railvays. Des proportions monumentales dans les édifices, une foule de types nouveaux créés pour les besoins de circonstances particulières, des procédés ingénieux, imaginés pour résoudre des problèmes qu’on n’avait pas encore osé aborder ; tout cela donne aux constructions architecturales qui dépendent des chemins de fer, un cachet spécial de grandeur, d’originalité et d’élégance.

Les ponts se classent d’après la nature des matériaux employés à leur construction. Il y a d’abord, les ponts en bois, ou estacades, ensuite les ponts en pierre, et ceux en fer.

Les ponts en bois sont les plus économiques, mais aussi les moins durables. Abandonnés en Europe, ils sont encore fréquemment employés aux États-Unis, où les convois franchissent les rivières et les marécages, sur des charpentes à peine terminées, sans parapets ni tabliers, au risque des accidents les plus horribles, qui n’arrivent, en effet, que trop souvent.

Les ponts en charpente sont très-communs en Angleterre, dans le Cornouailles, où ils ont donné lieu à des constructions d’une hardiesse et d’une légèreté admirables.

Le plus grand viaduc en bois qui existe, est celui de Haut-Portage, dont la longueur est de 267 mètres et la hauteur de 79 mètres.

Quelquefois, les estacades ne servent que d’une manière provisoire. On se hâte de construire à leur intérieur, des ponts définitifs ; puis on les démonte, sans que le service ait souffert un seul jour d’interruption.

C’est ainsi que le pont en tôle d’Asnières, sur le chemin de Paris à Saint-Germain, qui fut si stupidement détruit en 1848, fut reconstruit, la même année, sous une estacade provisoire, sans nécessiter la moindre interruption dans le service des lignes innombrables qui s’entre-croisent à chaque instant sur ce pont.

Les ponts de pierre qui atteignent une certaine longueur, se nomment viaducs.

Parmi les viaducs, l’un des plus remarquables et des plus connus, est celui du val Fleury, près Meudon, sur le chemin de fer de Versailles (rive gauche). Il fut construit par M. Doyen. Comme le fond de la vallée se compose d’un terrain argileux très-mou, il fallut pousser les fondations jusqu’à la couche de craie inférieure. Le volume de maçonnerie cachée sous terre, se trouve donc presque aussi considérable que la partie visible.

Les arches élancées de ce viaduc, remarquable par sa svelte élégance, sont pourtant moins élevées que celles du célèbre viaduc de Durham, en Angleterre, dont la hauteur est de 40 mètres. Les arches ont de 45 à 50 mètres d’ouverture.

Un des ouvrages de ce genre les plus hardis que nous puissions signaler, c’est le viaduc de la Goltsch, en Saxe, dont la hauteur maxima est de 80 mètres, et la longueur de près de 600 mètres. C’est la hauteur du sommet du Panthéon à Paris !

Le beau pont établi pour le passage de la Marne, à Nogent, près Paris, et les viaducs établis aux abords de ce pont, méritent aussi une mention spéciale. Pont et viaduc dessinent une courbe longue de 700 mètres. Les quatre arches qui s’élèvent sur la rivière, ont 20 mètres de haut et 50 mètres d’ouverture. Trente arcades, plus petites, les relient aux remblais des abords. La maçonnerie est faite en pierre meulière et ciment romain.