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dans la carrière, légers de ressources, mais animés du vif désir d’apprendre et de perfectionner vos connaissances, vous imposez des sacrifices, pour lire et étudier cet ouvrage, espérant y trouver une instruction spéciale ; dans vos jours de tristesse ou de fatigue, aux heures de découragement et d’anxiété, invoquez, pour relever votre âme abattue, le souvenir du misérable mineur, devenu le personnage le plus important de l’Angleterre, et ce qui vaut mieux encore, un bienfaiteur de l’humanité. Apprenez, par l’histoire de sa vie, à quoi peuvent conduire, dans la société moderne, l’application obstinée à l’étude et la continuité dans l’accomplissement du devoir. Ayez, en un mot, devant les yeux, comme modèle, comme guide et même comme espérance, le petit berger, le pauvre ouvrier chauffeur de Newcastle-sur-Tyne !

Moins brillante que celle de George Stephenson, la carrière de Séguin n’a pas été moins utile.

Né à Annonay, en 1786, Marc Séguin trouva dans son oncle Montgolfier, l’inventeur des aérostats, le meilleur et le plus dévoué des maîtres. Montgolfier s’attacha à développer ses heureuses dispositions.

Dès l’année 1820, Marc Séguin se distingua dans les constructions civiles, par l’exécution du pont suspendu de Tournon, construction en fil de fer, qui ne coûta que le tiers de ce qu’aurait coûté un pont en pierre. Plus de quatre cents ponts de cette espèce ont été construits, depuis cette époque, en des localités bien différentes. Les ponts en fil de fer inventés par Séguin aîné, sont le moyen le moins coûteux de traverser les rivières.

En 1825, Marc Séguin, associé avec ses frères et avec le fils de Montgolfier, fit les premières tentatives de navigation à vapeur sur le Rhône. C’est alors qu’il essaya, pour la première fois, sur un bateau à vapeur, sa chaudière tubulaire.

Les frères Séguin avaient obtenu, comme nous l’avons dit, la concession du chemin de fer de Saint-Étienne à Lyon. Marc Séguin y fit usage de sa chaudière tubulaire, qu’il avait fait breveter en 1828.

Nos bons voisins, les Anglais, qui veulent accaparer à leur profit toute invention et toute gloire, se sont plus d’une fois hasardés à attribuer l’invention des chaudières tubulaires à M. Booth, secrétaire de la compagnie du chemin de fer de Liverpool à Manchester. Cette prétention, qui n’est fondée sur aucune preuve, ne vaut pas la peine d’être réfutée.

On a voulu revendiquer, en France, l’honneur de cette invention capitale pour Charles Dallery, dont nous avons longuement raconté les travaux, dans la Notice sur les bateaux à vapeur, et qui prit en 1803, comme nous l’avons dit, un brevet pour une chaudière tubulaire, destinée aux bateaux à vapeur. Cette chaudière est décrite dans le mémoire de Dallery que la Collection des brevets d’invention expirés se borne à mentionner sous le titre vague de Mobile perfectionné appliqué aux voies de transport.

La chaudière de Charles Dallery ne fut jamais exécutée. Son invention, qui resta ignorée jusque dans ces derniers temps, ne put donc exercer aucune influence sur la découverte de la chaudière des locomotives, munie de tubes à feu.

Il ne faut pas oublier, d’ailleurs, qu’il existe deux espèces de chaudières tubulaires. Dans l’une, l’eau se trouve placée à l’intérieur des tubes, et le combustible en dehors ; dans l’autre, l’eau est placée, au contraire, dans les interstices des tubes, et ces derniers sont traversés par le courant d’air chaud qui arrive du foyer. Les chaudières de la première espèce, qui sont connues en physique sous le nom de chaudières de Perkins, et dont l’invention revient peut-être à Dallery, donnent tout au plus 300 kilogrammes de vapeur par heure. Celles de la seconde espèce ont donné 1 200 kilogrammes de vapeur, ce qui a permis de réaliser immédiatement des vitesses de dix lieues à l’heure.