Page:Figuier - Les Merveilles de la science, 1867 - 1891, Tome 1.djvu/176

Cette page a été validée par deux contributeurs.

sur l’artillerie. En 1786, il avait imaginé un double-vaisseau, composé de deux bateaux accolés, qu’il destinait à la mer et aux fleuves. Il fondait sur cette dernière invention de grandes espérances.

À cette époque, James Taylor, jeune homme intelligent et instruit, fut appelé dans la famille de Patrick Miller, comme précepteur des enfants. Initié aux travaux et aux recherches de Miller, il les suivit, d’abord par simple curiosité ; mais il y prit bientôt un intérêt et un rôle plus actifs.

Patrick Miller, qui venait de construire, à titre d’essai, un de ses doubles-bateaux de petites dimensions, destiné à naviguer sur les rivières, avait fait, à cette occasion, un pari contre un M. Wedell, gentilhomme du voisinage, résidant à Leith, et qui possédait un bateau d’une grande vitesse. Le jour étant pris pour cet essai comparatif, James Taylor accompagna Patrick Miller, pour lui prêter son aide dans cette petite lutte d’expérience et de plaisir.

Le double-bateau de Patrick Miller avait soixante pieds de long ; il était mis en mouvement par deux roues placées à ses flancs et manœuvrées par quatre hommes.

M. Wedell, qui dirigeait son propre bateau, eut le dessous dans cette lutte de vitesse.

Jeune et vigoureux, James Taylor, pendant cette petite excursion, s’était mis à manœuvrer les roues, avec les quatre hommes du bord. La besogne lui parut rude ; et cette circonstance lui donna la conviction que si l’emploi des roues sur les bateaux avait des avantages manifestes, il fallait, de toute nécessité, pour en tirer un grand profit, disposer d’une force supérieure à celle du travail des hommes. Il essaya de faire partager cette opinion à Patrick Miller, assurant que les roues ne pourraient rendre de grands services pour remplacer les rames, que quand on les mettrait en action par une force mécanique considérable, et d’une intensité supérieure à celle du travail humain.

Patrick Miller ne partageait point l’avis du jeune précepteur. Il espérait qu’un cabestan, bien disposé et manœuvré par des hommes, suffirait pour employer avec succès, les roues sur les bateaux et les navires.

Cependant il n’était pas entièrement satisfait de ce moyen, et cherchait quelque autre puissance mécanique susceptible de fonctionner facilement à bord d’un bateau. Il engagea James Taylor à réfléchir à ce sujet.

« Si vous voulez, lui dit-il, me prêter le secours de votre tête, nous trouverons peut-être l’agent de force mécanique que je cherche et qui m’est nécessaire. »

Après avoir passé en revue tous les systèmes mécaniques connus à cette époque, James Taylor s’arrêta à l’idée d’employer la vapeur comme force motrice.

« C’est un moyen puissant, répondit Patrick Miller ; mais j’entrevois de grandes difficultés dans son installation sur un bateau de rivière, et de grands dangers pour son emploi à bord des navires. Songez à l’incendie que peut provoquer le foyer d’une telle machine ! Supposez que le feu vienne à s’éteindre, par un coup de mer, au moment d’entrer dans le port ; un navire, près de la côte et aux approches des écueils du rivage, serait exposé à périr, par l’absence de toute force motrice. »

Ces objections n’agissaient que faiblement sur l’esprit du jeune précepteur, qui en revenait toujours à son idée de faire usage de machine à feu, sinon peut-être à bord des navires, au moins sur les rivières et les canaux.

Patrick Miller finit par se rendre à ses raisons.

« Eh bien ! dit-il, la chose mérite un essai. Concevez et soumettez-moi quelque projet d’appareil mécanique propre à transmettre aux roues du bateau les mouvements du balancier d’une machine à vapeur. »

James Taylor traça alors le plan d’un appareil destiné à faire tourner les roues d’un