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qui a fait, pendant quelque temps, le service du Havre à New-York.

La vapeur d’éther, employée comme force motrice, présente pourtant de graves dangers, en raison de son inflammabilité. Cette circonstance nous paraît de nature à empêcher son adoption définitive, surtout dans la navigation maritime. C’est donc avec raison que l’on a proposé de substituer à l’éther, le chloroforme, composé non inflammable, et qui jouit d’une force élastique supérieure encore à celle de l’éther.

M. Lafont, officier de notre marine impériale, a eu le mérite d’employer, dans une machine de ce genre, le chloroforme, que M. Du Tremblay avait d’ailleurs lui-même recommandé pour cet usage. La machine à chloroforme de M. Lafont, d’une force de 20 chevaux, a fonctionné pendant quatre ans, pour les travaux du port de Lorient. À la suite des résultats satisfaisants constatés pendant ce long service, le gouvernement a fait établir, à titre d’essai, un appareil tout semblable à bord du navire le Galilée, de la force de 125 chevaux.

Un mécanicien français, M. Tissot, a modifié les machines à vapeur d’éther, en supprimant la vapeur d’eau, et faisant uniquement usage d’éther sulfurique, additionné de 2 pour 100 d’une huile essentielle. Ce mélange paraît préférable à l’éther pur, en ce qu’il n’attaque pas, comme le fait l’éther, les pièces métalliques ; ce qui finit, à la longue, par occasionner des fuites, toujours dangereuses avec un liquide aussi inflammable que l’éther.

M. Tissot a établi cette machine à vapeur d’éther dans une brasserie de Lyon, où elle a fonctionné, selon lui, avec avantage[1].

Nous sommes fort peu partisan de toute machine de ce genre, dans laquelle on fait usage, non loin d’un foyer, d’un liquide éminemment volatil et éminemment inflammable. Nous répétons avec le rat de la fable :

Ce bloc éthérisé ne me dit rien qui vaille !

Il est arrivé, du reste, qu’un des paquebots pourvus d’une machine à vapeurs combinées, c’est-à-dire à vapeur d’eau et d’éther, s’est embrasé en pleine mer, par suite de l’inflammation de l’éther. Cet accident, qu’il était facile de prévoir, en dit plus que tous les raisonnements du monde.

Il y a mieux à faire, il nous semble, pour éviter les pertes de calorique des machines à vapeur ordinaires, que d’avoir recours à une vapeur inflammable, comme l’éther sulfurique. Nous croyons que les machines à vapeur d’éther, ou à vapeurs combinées, ont fait leur temps.

2o Les machines à air chaud. C’est à cette catégorie qu’appartient la machine Éricsson dont il a été si souvent question depuis 1852, dans les journaux américains et français.

Dans l’appareil qu’il a construit, M. Éricsson supprime complétement la vapeur d’eau, qu’il remplace par de l’air, alternativement échauffé et refroidi. La dilatation et la contraction successive qu’éprouve une masse d’air, contenue dans un espace limité, par suite de l’addition et de la soustraction du calorique à cette masse d’air, telle est la source de la puissance mécanique qui se trouve mise en jeu dans la machine Éricsson, dont voici les dispositions générales.

Un grand nombre de toiles métalliques, à mailles très-serrées, sont chauffées jusqu’à la température de 250 degrés. Une masse d’air froid traversant rapidement ces toiles métalliques, s’y échauffe instantanément, et se dilate aussitôt. L’impulsion produite par la dilatation de cet air, est mise à profit pour agir sur un piston, lequel joue dans un corps de pompe. Après avoir produit ce premier effet, la même masse d’air repasse à travers les mêmes toiles métalliques. Dans ce retour, le métal reprend à l’air la chaleur qu’il lui avait

  1. Voir notre Année scientifique et industrielle, 3e année, page 97.