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VAN DYCK.

force d’assimilation du grand portraitiste fut un inappréciable facteur dans l’histoire de la peinture. Instinctive et plus flamande qu’on ne croit, développée, affinée au cours des voyages, cette élégance infinie de Van Dyck que l’on admire comme une manifestation exceptionnelle — mais que des esprits étroits jugent dédaigneusement au nom de je ne sais quel protectionnisme esthétique — devient un exemple, une ressource, un idéal pour tous les peintres qui suivront. Supposez le XVIIe siècle privé de Van Dyck. Peut-être l’admirable école des portraitistes français du XVIIIe siècle aurait-elle rayonné d’un éclat moins vif et surtout moins soudain. Supposez maintenant que l’artiste ait passé les dix dernières années de sa vie à Anvers au lieu de porter son art aristocratique et subtil à Londres. Nous n’aurions certainement pas connu de peinture anglaise. Nous n’aurions admiré ni les œuvres de Gainsborough, de Lawrence, ni celles de l’illustre Reynolds qui, dans un élan d’enthousiasme filial, écrivait : « Van Dyck est le plus grand peintre de portraits qui ait jamais existé. »

Tandis que Rubens et son cortège brillant de collaborateurs font, à Anvers même, resplendir la gloire de la peinture flamande, Van Dyck est le missionnaire éloquent que le destin choisit pour assurer au dehors l’avenir de l’art. Le tumulte triomphal de la peinture flamande du XVIIe siècle étouffe la voix de bien des artistes. Que d’individualités effacées ou fondues dans le soleil de Rubens ! La réserve et la séduction de Van Dyck sont une leçon