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VAN DYCK.

Le Charles Ier, mieux que les Trois têtes, trahit l’origine anversoise de Van Dyck. Un peintre flamand pouvait seul rapprocher avec cette heureuse intrépidité les gris bleuâtres, les blancs dorés, les tons fauves du costume royal. Van Dyck, de plus, composa une scène originale et vivante. Depuis son arrivée à Londres, il s’était détourné presque complètement des œuvres religieuses et mythologiques. Il n’avait guère réussi jadis dans les grandes compositions. Toutefois, à cette « école » il avait acquis une particulière sûreté dans l’arrangement de ses portraits en groupe. Cette science est si naturelle dans le Charles Ier qu’on se croirait devant une scène véridique. Rien de plus vrai que l’attitude du valet retenant le cheval au col fin et courbé ; rien de plus noble que la pose délicatement impertinente de ce roi frêle profilé sur l’exubérante nature chère aux maîtres d’Anvers. Un suprême rayon des splendeurs vénitiennes colore le domaine du souverain nostalgique… Tout Van Dyck est dans ce chef-d’œuvre : technicien merveilleusement habile, gentilhomme accompli, créateur découvrant des lois nouvelles de lumière, de coloris, de style pour les portraitistes de l’avenir. Peut-être une dernière influence est-elle venue favoriser cette transformation décisive. Velasquez semble avoir impressionné l’artiste flamand à un certain moment. Waagen le premier en a fait la remarque. Mais le maître espagnol devait lui-même beaucoup au maître anversois dont il avait vu les œuvres à Gênes. Ce fut donc entre eux un échange infiniment utile à l’art ; ils étaient égale-