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3li LES PRIMITIFS FLAMANDS

le mari vêtu d'une merveilleuse simarre foncée doublée de zibeline. La sainte Catherine qui présente la donatrice évoque à nouveau le souvenir des types primaticiens. De la même année — t556 — datent les deux magnifiques panneaux où sont représentés avec une sincérité infiniment pittoresque trente et un confrères de la corporation du Saint- Sang (chapelle de ce nom). Agenouillées, rangés avec symétrie, ils montrent des têtes énergiques ornées de barbes rousses ou brunes ou des visages florissants un peu salis par le poil du menton rasé. Aujourd'hui encore, en voyant passer dans les rues de Bruges ou de Gand des types flamands caractéristiques, — jeunes gens aux faces musclées, bourgeois gras au teint couperosé, vieillards glabres et finauds — tout de suite on songe aux confrères et aux marchands si loyalement peints par Fourbus.

Trois ans plus tard — iSSç — le maître signe la grande Cine de la cathédrale de Saint-Sauveur d'un ensemble si solennel et si froid. Toutes les conventions prônées par les ateliers romanistes y triomphent et les contemporains ne pouvaient souhaiter application plus sévère des doctrines méridionales. Hélas ! l'âme flamande s'assimilait mal l'âme antique et ces apôtres aux toges impeccables sont bien ennuyeux. Deux ou trois apôtres pourtant retiennent l'attention ; ce sont des portraits. Les volets représen- tent à droite Abraham et Melchisedech , à gauche Elie sous le genévrier et dans l'ange de ce dernier panneau nous croyons encore une fois distinguer des élégances empruntées aux maîtres de Fontainebleau. Nous ne savons point si Fourbus visita l'Italie. Flusieurs de nos maîtres à cette époque connurent l'art transalpin en travaillant avec de grands artistes d'Italie à la cour de France. Ce fut peut-être le cas de Fourbus. Les quinze membres de la confrérie du Saint-Sacrement qui firent exécuter ce triptyque figurent au revers de l'un des volets, accompagnés de leur bedeau (Fig. CCXXVI). Ils sont parmi les portraits les plus vivants et les plus inoubliables du maître. Une autre grande Cène, tout aussi conventionnelle que celle de Saint-Sauveur, date de \56z et se trouve à l'église Notre-Dame (Fig. CCXXVII). Il semble que le maître l'ait exécutée avec des soins particuliers ; mais il serait téméraire de porter une appréciation sur la technique d'une œuvre qui dès l'année 1589 était restaurée par Antoine Claeissins. Ici encore deux ou trois visages ont le relief et la vie des portraits d'après nature.

La "réputation de Fourbus portraitiste était telle qu'en t56o le maître était chargé de peindre pour la salle des fêtes de l'Hôtel de Ville les portraits de Charles-Quint et de Philippe II. Mais l'Empereur était mort et son fils était en Espagne; nous ne savons de quels documents le maître se servit et les deux portraits ont d'ailleurs dis- paru depuis longtemps. On a conservé en revanche une œuvre capitale qui date de l'année suivante i56i : un panneau représentant treize membres de la famille van Berchem (collection du marquis de la Boëssière-Thiennes, Bruxelles) (Fig. CCXXVIII). Les