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LES PRIMITIFS FLAMANDS 277

Mander a eu le tort de confondre avec la ville de Brëda. » Il fit son apprentis- sage chez Pierre Coecke, et certes, un tel maître, versé entre tous dans la rhéto- rique de l'art, ne semblait nullement fait pour préparer un tel élève qui devait tout ou presque tout demander à l'observation de la nature. Bruegel pourtant ne négligea point ses classiques. Reçu à la Gilde d'Anvers en i55i, il partit aussitôt pour l'Italie; en i553 il était à Rome (i), après quoi il poussa jusqu'en Sicile — d'après un de ses dessins représentant le stretto de Messine on grava dans la suite un beau combat naval — et revint par le Tyrol à la fin de la même année. Pendant les huit premières années de sa maîtrise, sa signature est orthographiée Brueghel ; mais à partir de 1559 on trouve la forme simplifiée de Bruegel sur toutes les œuvres datées du maître et il est curieux de constater que cette modification du nom coïncide avec l'affirmation définitive du génie de l'artiste.

Employé jusqu'alors comme dessinateur (et non point comme graveur, car il ne grava lui-même qu'une pièce), par Jérôme Cock, — éditeur d'estampes et fonda- teur de la boutique des Quatre- Vents à Anvers, — Bruegel s'est tout d'abord manifesté comme paysagiste dans les nombreuses compositions alpestres qu'il rapporta d'Italie et l'influence du Titien, a-t-on dit non sans raison, se fait jour dans ces premières œuvres.

Remarquons à ce propos que tous les paysages de la peinture néerlandaise dans la première moitié du XVI' siècle — ceux de Patinir, Blés, van Orlcy, Quentin, Corneille et Jean Metsys, Corneille Coninxloo, van Clève, Blondeel, comme aussi ceux de Diirer, Altdorfer, Scoreel, — sont presque toujours inspirés de sites mon- tagneux, très accidentés et très peu septentrionaux. Tous ces peintres adoptent le même étoffage « romantique » de fonds bleuâtres avec rochers déchiquetés, vallées pittoresques, ruines, tours, etc. Paul Bril au début de sa carrière ne connaît pas d'autre formule et les origines de celle-ci doivent sans doute être cherchées dans les paysages de Léonard de Vinci. Peut-être Jacopo dei Barbari — qu'on songe à sa Vierge et les Saints du Musée de Berlin — en est-il le propagateur en Néerlande. Bruegel pendant longtemps y fut fidèle.

Nous ne savons point d'ailleurs dans quelle partie des Alpes ce dernier a copié ces vallées romantiques où les méandres des rivières torrentielles se déroulent entre d'immenses montagnes rocheuses. Van Mander au sujet de ces compositions se contente de dire : « Au cours de ses voyages il fit un nombre considérable de vues d'apris nature, au point que l'on a pu dire de lui qu'en traversant les Alpes il avait avalé les monts et les rocs pour les vomir, à son retour, sur des toiles et des panneaux, tant il parvenait à rendre la nature avec fidélité ».

(1) S<jour attesta p*r deux ctux-forles signée* et dal^c* de la Ville Eternelle : rEaUtMiReiil de PtycM et DUaU et Ican.