Page:Fierens-Gevaert - La Peinture en Belgique, volume 2.djvu/212

Cette page n’a pas encore été corrigée

276 LES PRIMITIFS FLAMANDS

riques des églises du moyen âge sont peut-être les vrais inspirateurs de Bosch, ainsi que semble l'avoir démontré M. L. Maeterlinck dans son volume sur les mora- listes redoutables et dépourvus de vergogne qu'étaient les imagiers de stalles gothiques (i). Le réalisme fantastique et lyrique de Bosch est annoncé en outre par les recherches d'expression et de caractère du « Maître E. S. », de Martin Schongauer, d'Israël van Mcckenen, d'Antonello de Messine, de Léonard de Vinci lui-même qui dessina en psychologue d'étonnantes caricatures où s'affirment puissamment les traits de la bête (2). Les précurseurs de Bosch sont les mêmes que ceux de Bruegel, et celui-ci trouve leur enseignement résumé dans les productions du grand visionnaire de Bois-le-Duc. Toutefois une sorte de tradition qui oppose l'inspiration locale et populaire aux recherches de style et de beauté idéaliste des italianisants, s'établit fortement dès les débuts du XV!""' siècle et favorise l'éclosion d'une véritable école de peintres de genre. Quentin Metsys lui-même, si tenté qu'il soit par les nouveautés méridionales, donne l'exemple, suivi de Marinus van Reymerswaele et de Jean Metsys, lequel accentua jusqu'à l'excès le double aspect classique et local de l'art paternel. Corneille Metsys, Van Mandyn, Huys, Van Hemessen, Pieter Aertsen sont tous nés avant Peter Bruegel et composent avec le grand « peintre des paysans » ce groupe vivant et bien autochtone dont les truculences, les gaietés, le naturalisme impénitent combattent les effets de l'invasion italienne. Ces purs terriens ne sont d'ailleurs pas insensibles à la noblesse classique et leurs œuvres souvent nous en informent par des réminiscences méridionales tout à fait imprévues. Très au fond, ils ont, eux aussi, la nostalgie du pays de Raphaël où d'ailleurs on voit plusieurs d'entre eux — Bruegel en tête, — pèleriner avec joie. Le classicisme d'importation et le réalisme local ne faisaient peut-être point si mauvais ménage qu'on le croit et qu'on le dit communément. On sait que l'accord fut définitivement scellé par le génie de Rubens, à qui les artistes penseurs de la Haute Renaissance et les génies locaux, tels que Bruegel, inspiraient une égale ferveur.

  • *

On ne connaît pas encore la date exacte de la naissance de Bruegel l'ancien. Il vit le jour entre 1628 et i53o, probablement dans « un village actuellement dénommé Brôgel, aux environs de la petite ville de Brée, dans la Campine limbour- geoise, qu'on appelait autrefois Breede, Brida et en latin Breda et que van

(1) L- Maetedlinck, Le genre saltrique dans la sculpture flamande et wallenne- Jean Schemit, Paris 1910. (») Voir notre chapitre XXVI (Jérôme Bcscb).