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236 LES PRIMITIFS FLAMANDS


Van Orley, disions-nous, achevait le portrait de son ami de Zelle, quand il reçut la commande d'un grand triptyque pour la chapelle des Aumôniers ou Maîtres des Pauvres de la ville d'Anvers. L'œuvre est aujourd'hui au Musée de cette ville; elle représente les Sept œuvres de Miséricorde et, dans la partie supérieure, le Jugement dernier (Fig. CLXXVII). Van Mander signale le triptyque, lequel fut payé six cents florins et ne fut vraisemblablement achevé que vers i525. De plus en plus l'artiste flamand se rapproche du style monumental de l'école romaine. Certains tableaux de petite dimension montraient van Orley soucieux de groupements synthétiques et d'expressions idéalistes; le retable de Job manquait peut-être de netteté dans l'assimilation des doctrines romaines. Le triptyque des Aumôniers d'Anvers proclame la fin des hésitations ; non seulement les Apôtres planant sont une réminiscence de la divine "Dispute, non seulement le caractère des architectures (notamment de la loggia du volet gauche) indique une connaissance plus sérieuse des nouveautés architecturales d'Italie, — mais voici que la composition, au lieu de répartir mathématiquement les épisodes dans les diverses parties du retable, à la façon primitive, se développe dans l'ensemble du triptyque et prétend à l'unité. Par malheur le coloris n'a plus la beauté de celui du retable de Job et, à cet égard, la comparaison entre les deux œuvres est toute au désavantage du triptyque d'Anvers. — Une Crucifixion du musée Boymans à Rotterdam, peinte vers 1524, est à rapprocher du retable des Aumôniers ; on y voit une Charité qui ne serait que le portrait idéalisé de Marguerite d'Autriche. Le Jugement dernier de la collection Weber à Hambourg, fort retouché et d'une exécution lourde, n'est qu'une œuvre d'atelier.

Nous retrouvons le beau coloriste dans le triptyque de la famille de Hanneton du musée de Bruxelles. Œuvre ample et élevée, où le maître cette fois est très près de hausser son style et sa technique au même niveau. M. Friedlânder a bien raison de la maintenir au catalogue de Bernard van Orley. Au centre du triptyque est une Déposition de Croix (Fig. CLXXVIII) avec des figures luinesques, léonardesques et belliniennes. Dès qu'il peint des types idéaux, l'artiste choisit ses modèles en Italie ; et quand il s'efforce, comme ici, à la peinture intensive de la douleur il agrandit les formes et dramatise les gestes tout en simplifiant le modèle. Les volets, avec les donateurs, (Fig. CCXXIX) diffèrent sensiblement de caractère ; portraitiste, van Orley reste traditionnel comme dans son Georges de Zelle; il individualise par l'analyse et le patron du triptyque des Hanneton s'inspire d'une esthétique pareille à celle qui engendra les saints