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mages de Jean de Casembrool. Une douzaine de tableaux furent catalogués sous le nom du maître dans le palais de Madrid, à la mort de Philippe II ; quatre numéros de la collection Guevara y figuraient. Enfin le château de chasse du Prado ne montrait pas moins de sept Tentations de saint Antoine signées du nom glorieux de Hieronimus Bosch. L’engouement de l’Espagne pour ce Brabançon septentrional a rappelé à la mémoire d’un critique le mot de Guicciardini : « L’Espagnol, ennemi du travail et de l’industrie dans son pays, prend tout des Pays-Bas.

Les Commentarios de don Felipe de Guevara éveillent des soupçons quant à l’authenticité des nombreux « Bosch » conservés en Espagne et ailleurs. Aussi la critique moderne a-t-elle révisé sévèrement le catalogue des Hieronimus van Aken et n’y a-t-elle guère maintenu qu’une douzaine de tableaux. Encore l’attribution de quelques pages capitales (le triptyque de Valence, la Cure de la Folie du Prado notamment) reste-t-elle un sujet de polémiques. Il est certain que du vivant de Bosch on décalquait ses tableaux et les plagiats, — avec monogramme parfaitement imité. — étaient souvent l’œuvre d’artistes remarquables. Quel est ce copiste fidèle que don Felipe de Guevara signale avec une sorte d’admiration ? On a songé à Bruegel le Vieux, si imprégné d’esprit boschien dans ses premières peintures. Mais M. Dollmayr, rédacteur du Jahrbuch der Kunsthistorischen Sammlungen de Vienne, étudiant le triptyque du musée de Valence et le Jugement Dernier de Vienne qui passaient pour des Bosch indiscutables, remarqua sur les deux tableaux le monogramme M. Il crut d’abord que la lettre était un B retourné, marque modeste du plus respectueux des copistes du maître. L’excellent critique Gluck, reprenant la question, soutint que le monogramme était un M cl proposa d’y voir la signature de Jan Mandyn d’Anvers (1502 † 1560) signalé comme un des plus infatigables plagiaires de Bosch. Dollmayr dans sa réplique détruisit la thèse de Gluck, tout en reconnaissant que bon nombre de tableaux de Mandyn « naviguent sous le pavillon de Bosch » ; il ajoutait qu’on pouvait attribuer à Jan Mandyn le Saint Christophe de la Pinacothèque, les Châtiments de l’Enfer, du comte Harrach de Vienne, la Tentation de saint Antoine, de la Galerie impériale de Vienne et les Épreuves de Job du Musée de Douai, — et, après avoir proposé l’identification de Gilles Mostaert avec le monogrammiste M, il finissait par avouer, avec la plus entière franchise, l’impossibilité de jeter quelque lumière parmi tant d’obscurité. M. Gluck,