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prodigieuse ; les couleurs : le bleu, le rouge, le pourpre sont inaltérables et si belles qu’on les dirait dans toute leur fraîcheur… les artistes en sont frappés de stupeur ; oui, l’œuvre, dans son ensemble, les décourage. » (Trad. Hymans.)

1641. Le 1er juin le feu embrase la toiture, nouvellement reconstruite, de la grande nef de Saint-Bavon ; le chef-d’œuvre est déposé en lieu sûr en moins d’une heure.

1662. Les figures d’Adam et d’Ève sont nettoyées par le peintre A. van den Heuvel.

1781. Joseph II visite l’église Saint-Bavon et se déclare scandalisé par la vue d’Adam et d’Ève ; les deux panneaux sont remisés dans les combles.

1794. Les commissaires français enlèvent les panneaux du milieu, — partie fixe. L’évêque de Gand, Mgr Fallot de Beaumont, réussit à empêcher le départ des volets, — partie mobile.

1799. On expose au Louvre les panneaux enlevés, qui produisent une sensation énorme.

1815. Grâce à la fermeté de Wellington, les panneaux enlevés reviennent à Gand au milieu de l’allégresse populaire.

1816. Les panneaux enlevés par les commissaires français sont remis en place le 10 mai, et le gouverneur de la Flandre orientale prend un dispositif remarquable portant notamment que les restitutions se font « sous la condition expresse que les tableaux rendus ne pourront jamais être aliénés sans l’autorisation du gouvernement » et que « les maires feront chaque année rapport sur l’état des tableaux ». — Mais la même année, les volets conservés en 1794 et qu’on avait négligé de remettre sur l’autel, sont vendus au marchand Nieuwenhuis, un Hollandais habitant Bruxelles. Dès 1815, les marguilliers avaient cherché à vendre en Angleterre les six panneaux en question. Nieuwenhuys consentit à donner mille francs par volet, — prix fixé par les marguilliers eux-mêmes, — à la condition que les peintures lui fussent livrées dans les vingt-quatre heures. L’évêque, Mgr de Broglie, étant absent, le vicaire général, J. Le Surre, prit l’avis de deux hommes « compétents », dont l’un déclara que les volets n’avaient d’autre mérite que leur « antiquité » et qu’un amateur en donnerait bien cent francs pièce ! Les volets furent livrés à Nieuwenhuys. (Anges musiciens, Anges chanteurs, Pèlerins, Ermites, Chevaliers et Juges). Quelques archéologues déposèrent une plainte ; une descente de justice fut opérée chez le brocanteur. Mais déjà les six panneaux étaient sortis clandestinement de Belgique. Nieuwenhuys les vendit 100,000 fr. à un Anglais, appelé Solly, qui habitait l’Allemagne et qui les céda avec un gros bénéfice au roi de Prusse.