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de Bruges, saint Donatien, en splendide vêture épiscopale, la croix processionnelle dans une main et, dans l’autre, la roue aux cinq cierges rappelant son miraculeux sauvetage.

Le trône avec ses beaux accessoires sculptés, le lapis oriental, les cheveux d’or de la Vierge, l’armure et le pennon de saint Georges, la chape brodée de saint Donatien, la lumière fluide que les vitraux tamisent dans le déambulatoire s’harmonisent sur une trame d’or, la matière s’épaississant parfois dans les ombres, le modelé s’obtenant par des superpositions de pâtes de plus en plus légères, de plus en plus transparentes, de façon à ménager les dessous, à renforcer les valeurs, sans rien enlever de leur éclat. Traduite en étincelantes colorations d’émail, la Madone du chanoine van der Paele, a dicté l’ordonnance d’un grand nombre de tableaux brugeois ; Memline notamment y a trouvé la formule de son chef-d’œuvre le Mariage mystique de sainte Catherine. Une copie de la Madone est à Hampton-Court et le Musée d’Anvers possède une magnifique réplique du retable, provenant de Watervliet, exécutée dans le courant du XVe siècle, de dimensions un peu moindres, d’une technique très sûre et très forte dans le manteau bleu de saint Donatien notamment, où courent des broderies d’or, et dans la tête du chanoine finement ombrée.

Nous pensons que c’est après la Vierge du chanoine van der Paele que Jean van Eyck exécuta l’Annonciation de Saint-Pétersbourg (volet gauche d’un triptyque dont le centre et le volet droit sont perdus). L’œuvre provient de Dijon ce qui fit supposer qu’elle fut exécutée vers le même temps que la Vierge du chancelier Rolin[1]. Mais le modelé plus doux, plus fondu, est celui des dernières œuvres du maître. L’église où se déroule cette Annonciation est décorée d’un dallage à figures qui rappelle le pavimento de la cathédrale de Sienne. On y peut voir l’indice d’un voyage de Jean van Eyck en Italie et cette hypothèse se trouve fortifiée par l’évocation d’Assise qui apparaît dans le fond du précieux petit tableau : Saint François recevant les stygmates (Pinacothèque de Turin). Un document de 1470 attribue cette dernière œuvre à Jean van Eyck. Elle est sans doute contemporaine de l’Annonciation, et, d’ailleurs, dans la dernière partie de sa carrière le maître exécuta un groupe de charmantes petites œuvres religieuses : la Vierge dans l’église (original perdu), le petit autel portatif de Dresde, délicieux bijou pictural, la jolie Madone de l’Institut Staedel à Francfort, la Sainte Barbe inachevée (1437) et la Madone à la Fontaine (1439), ces deux dernières au Musée d’Anvers. Ce musée possède aussi l’une des cinq répliques connues de la Vierge dans l’église (catalogué actuellement sous la mention : Maître

  1. C’est l’opinion que nous avions tout d’abord adoptée dans notre Renaissance Septentrionale.