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l68 LES PRIMITIFS FLAMANDS

aperçoit avec surprise une bienheureuse dansant à la manière des nymphes de Botticelli. Quant au coloris, pâle, laiteux pour les chairs, assez vivement ombré pour les autres parties, il est fort différent de celui du triptyque d'Adam de Riebeke, et plus encore de celui du Martyre de sainte Catherine du Musée d'Anvers.

Cette dernière œuvre est d'un faste admirable. (Fig. CXXIX). Par là elle entre en plein dans les visées de la nouvelle école anversoise. Ce martyre est une fête, comme le seront tous les martyres des grands peintres d'Anvers. Un bourreau trapu, vêtu d'un pourpoint vert et de chausses gris-perle, s'apprête à décapiter la Vierge d'Alexandrie dont la tête charmante évoque à la fois les madones de nos derniers gothiques et celles des maîtres léonardesques. Le groupe de Maximin et de sa cour (la tête du cheval de l'Empereur est remarquable), les architectures chargées d'orne- ments plateresques, le paysage bleuâtre, la scène du supplice de la roue traitée en minuscule scène de genre, — tous ces éléments forment par leur parfaite juxtaposition, leur colons vivant, fin, soyeux, un tableau vraiment magnifique. Les temps sont passés des scènes de torture mystique que peignait Thierry Bouts, ou des terribles écor- chements représentés par Gérard David. Les bourreaux ne disparaîtront pas; mais les martyres deviendront des triomphes, — et si Jean Prévost a peint cette Sainte Cathe- rine à Bruges, Bruges ne pouvait plus se reconnaître dans cette peinture de luxe et d'apparat.