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tSi LES PRIMITIFS FLAMANDS

Les autres œuvres du plein épanouissement de Gérard David sont : trois volets de retable au Musée Brignole à Gênes, un Saint Michel au Musée Impérial de Vienne, une très belle Annonciation de la collection du prince de Hohenzollern à Sigmaringen (très attirante par la simplicité de son décor, le sentiment d'une Vierge digne de Roger van der Weyden et l'incomparable distribution de la lumière), enfin le fameux retable du Musée de Rouen. Cette dernière œuvre est considérée généralement comme le chef- d'œuvre de l'artiste qui l'offrit aux Carmélites du couvent de Sion à Bruges en iSoç (i)- Au centre du tableau la Vierge porte sur ses genoux l'Enfant Jésus tenant entre les mains une grappe de raisins, symbole de l'Eucharistie. Diverses saintes entourent la madone et sur le côté à gauche du spectateur, le peintre s'est représenté lui-même. Il se pourrait que quelques-unes des virginales créatures représentées fussent des portraits. Mais par la présence de deux anges d'allure classique, par l'absence de décor brillant, la simplicité des visages, le rythme de l'ordonnance et la distribution décorative des figures, l'œuvre accuse une orientation nette vers un art de synthèse de plus en plus prononcée. Gérard David toutefois n'est point gagné à la renaissance païenne et à voir la constance avec laquelle il habille l'Enfant Jésus (voyez aussi l'enfant divin du retable de Jean des Trompes) on imagine volontiers que ce pieux Flamand, épris de belles formes, a entendu la voix de Savonarole prêchant aux artistes le respect de Platon et l'amour de la vertu chrétienne.

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La visite faite par Gérard David à Anvers détermina une quatrième et dernière période de sa production. Le maître fut reçu en i5i5 par la gilde anversoise et y rencontra Quentin Metsys qui incarnait brillamment l'école nouvelle de plus en plus attirée par la réalité, le mouvement et les mises en page décoratives. Gérard David s'inquiéta de ces recherches et la trace en est sensible dans un Golgotha du Musée Brignole à Gênes, une Adoration des Hois et une Piéta de la National Gallery, un "Repos en Egypte, de la collection R. Kann à Paris, une Sainte Famille de la collec-

(i) La Madone de Rouen fut vendue à Bruxelles en juillet 178S lors de la suppresilon des couvents. Elle se retrouva au Louvre où les inventaires l'attribuèrent à Memlinc, et la font provenir de l'c.nigré Miliotti (?). En i8o3, le Musée de Paris la donna à la ville de Rouen- Les volets ont disparu. Ils n'avaient probablement pas grande valeur; Gérard David les avait laissés en bois, sans peinture; celle-ci y fut exécutée plus tard, on ne sait par qui, ainsi que le constate l'inventaire du couvent (trad. du flamand paf Weale) : « . . les volets du susdit tableau n'étaient peints ni à l'extérieur ni à l'intérieur, et actuellement, en i536, on les a ôtés pour les peindre et vernir... ». Cf. Journal des Beaux-Aria, 1869, p. 5z.