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LES PRIMITIFS FLAMANDS t3l

et des personnages (on compte deux cents figures sans les chevaux, chiens, etc.) nuit fort à la lisibilité de l'ensemble. Le coloris manque au surplus d'éclat dans celle oeuvre par trop célèbre, mais les portraits des donateurs sont charmants, et si vraiment ils représentent Guillaume Vrelant et sa femme, Mcmlinc n'aura point déçu l'espoir du maître enlumineur, son client et ami.

C'est au moment où il aurait peint ce tableau de Turin (employons un prudent conditionnel), que le maître sans doute exécuta le diptyque du Louvre (la Vierge et les Saintes d'une part, saint Jean-Baptiste et le donateur Jean du Celier de l'autre), puis les magnifiques figures de Guillaume Moreel et de sa femme Barbara de Vlaenderberghe (Musée de Bruxelles) (fig. XC et XCl). On suppose que ces deux effigies célèbres sont les volets d'un triptyque dont la partie centrale serait perdue (i). Descendant d'une famille italienne, les Morelli, établie dans les Flandres depuis deux ou trois généra- tions, Guillaume Moreel fut bourgmestre à plusieurs reprises, occupa un rang élevé dans la vie sociale et politique de Bruges, et incarna puissamment la bourgeoisie intransi- geante d'une ville qui, malgré sa décadence toute proche, devait encore s'insurger contre l'empereur d'Allemagne. Memlinc comprend à merveille le personnage et son milieu ; la fidélité du maître à la nature est moins entière que celle de van Eyck ; mais peut-être juge-t-il plus librement ses modèles et en exprime-t-il mieux les caractères moraux. Et l'on ne peut que répéter ces réflexions devant le portrait de Barbara de Vlaenderberghe van Hertsvelde, femme de l'énergique bourgmestre.

En 1479, Memlinc peignit le petit et délicieux triptyque de Jean Floreins, alias Van der Rijst (Musée de l'Hôpital de Bruges), inspiré du Roger van der Weyden de Sainte-Colombe conservé à Munich. La partie centrale : VJldoralion des Mages (fig. XCIl) diffère pourtant de la conception du portraiteur de Bruxelles. Tenant l'enfant Jésus, enveloppée d'un grand manteau bleu, la Vierge est placée exactement au centre avec saint Joseph tout en rouge à ses côtés. Outre les rois mages, somptueusement vêtus (2), on voit dans ce panneau le donateur Jean Floreins accompagné de son jeune frère Jacob (à droite). Le volet de droite, la J^ativilé (fig. XCIII), d'une exécution moins magistrale que V Adoration, porte au revers un saint Jean très doux qui passait autrefois pour représenter Memlinc lui-même. La Vrésentalion au Temple, volet de gauche, est une scène de petite dimension, simple et gran- diose, où la solennité mystique de Roger van der Weyden est peut-être surpassée (fig. XCIV). Tout le triptyque de Jean Floreins garde une clarté d'exposition et un charme de coloris que sont loin d'avoir les œuvres synoptiques telles que la

(t) II» auraient appartenu jadia i l'HApitat Saint-Julitn de Brugca.

(1) L'un d'eux aérait Charica le Téméraire. C(. D' RuuaacT. Cbcrlti U TH^inir* HalUll rrrfnalbt? BrafO, t^o».