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LES PRIMITIFS FLAMANDS 123

A quelle date Memlinc vint-il s'installer à Bruges? Très probablement dans le courant de l'année 1468, l'année où l'on célébra les fameuses noces de Charles le Téméraire et de Marguerite d'York, — une des plus éblouissantes féeries de l'époque bourguignonne qui en vit tant. Nous y avons fait plusieurs allusions déjà. Le duc appela à Bruges cent trente-six peintres et vingt-neuf sculpteurs pour réaliser le cadre des réjouissances. Maîtres et « ouvriers » venaient de tous les coins des Pays-Bas et leur directeur et inspirateur fut, nous l'avons dit, Jacques Daret à qui des artistes notoires apportèrent leur concours. Les rues furent tendues de tapisseries et de drap d'or ; on éleva des hourdages sur lesquels on représenta, en tableaux vivants, des scènes de l'histoire sainte et de l'antiquité païenne se prêtant à des allusions de circonstance : Adam recevant Eve de Dieu, Antoine et Cléopâtre (1). En* sollicitant notre imagination par le récit des vieilles chroniques il est possible de ressusciter les cortèges des métiers, magistrats, marchands, consuls étrangers, baillis, seigneurs, chevaliers de la Toison d'or, ménestrels, prêtres et religieux allant quérir les souverains et leur Cour au Prinsenhof et les conduisant à la Grand'PIace de Bruges où le Grand Bâtard, Antoine de Bourgogne, tenait Pas d'Armes sous le nom de Chevalier de l'Arbre d'or. De telles pompes s'évoquent uniquement par le moyen d'un charmant artifice spirituel. Toute tentative de réalisation matérielle ne peut qu'apparaître imparfaite et carna- valesque (2).

Le nom de Memlinc n'est point prononcé à l'occasion des noces de 1468. Selon toute vraisemblance, le maître vint à Bruges alors que les travaux les plus importants de la décoration publique étaient distribués. Comme on ne voulait point lui offrir une besogne médiocre, il ne fut pas employé à la parure de la cité. On savait ses mérites dans l'entourage du Téméraire et le portrait du ciseleur ducal Nicolas di Forzore Spinelli (Musée d'Anvers, fig. LXXX) qui est précisément de 1468 le prouve. C'est la seule œuvre, avouons-le, qui témoigne des relations de Memlinc avec la cour ducale (3). Spinelli (à qui l'on doit les médailles de Laurent le Magni- fique, de l'historien-poète Antonio Geraldini et d'Alphonse d'Esté) tient en main

(1) FÉTi». Hialoire du Théâtre en Belgique. Palrta Belgica, T. III, p. 791.

(x) Que 1m Brugeois mVxcusenI ! La récenlt reconstitution " «cientifique " du P»« de l'Arbre d'Or me p»n»l un morne divertissement et je ne saurais dire combien me sembla triste et ibsurde le pauvre figurant en maillot jaune <iue du Pont des Espagnols, à l'instant d'un crépuscule admirable, je via s'enfoncer en titubant dans l'ombre des rutile» C'en ptr Ai bric..à>brac, hilas ! que nous remplaçons les merveilles d'autrefois...

(3) Spinelli, né en 14^0, fut au service de Charles le Téméraire comme graveur de sceau» et aéiaania un 4<mM

à Bruges en 1467-68. En 1474 il était à Florence; en 1493 il quittait l'Italie pour se rendre i Lyon où il mounil en 1499.

. laissant deux fils. Domenico et Niccolo. qui continuèrent l'art paternel. Ce fut i Lyon que le baron Vivant Denon acheta « 

portrait de Memlinc. longtemps attribué è \ tonello de Messine et qui fut acquis par van Ertbom. lequel Ugu l'omrc ra Humtt

d'Anvers. On a lenlé ces teirps derniers de le restituer à Antonello, — mais sans preuves.